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« La disparition du Mali, du Niger et du Burkina Faso des radars de l’information internationale masque les souffrances du Sahel »

Sur la carte du monde des atteintes à la liberté de la presse publiée par Reporters sans frontières (RSF), la Russie, la Chine ou la Corée du Nord apparaissent en bien plus foncé. En matière de médias muselés, d’information manipulée et de journalistes ciblés, il y a encore pire sur terre que les pays du Sahel. Mais la quasi-disparition du Mali, du Niger et du Burkina Faso des écrans radars de l’information internationale est une réalité qui cingle dans le monde francophone, soulignant non seulement le divorce avec Paris, mais aussi le brutal repli de ces pays et leur régression démocratique.

Au Mali, au Niger et au Burkina Faso, entre enlèvements, menaces, censure, interdictions et arrestations, le Sahel est devenu « un désert de l’information et un cimetière de journalistes », résumait en novembre un reportage de France 24 diffusé à l’occasion du dixième anniversaire de l’assassinat, près de Kidal (nord du Mali), de Ghislaine Dupont et de Claude Verlon, envoyés spéciaux de Radio France internationale (RFI).

Cette tragédie, toujours en cours d’élucidation par la justice française, a marqué le début d’une série macabre et d’un tournant historique : de foisonnante et vivace, la couverture médiatique de cette immense zone déshéritée, marquée par la multiplication des radios locales et la puissance de l’audiovisuel extérieur français, s’est appauvrie, étiolée.

Les reportages ont laissé la place à la communication des juntes qui tiennent désormais ces trois pays aux prises avec des attaques djihadistes, et aux enquêtes faites à distance, par le biais de WhatsApp ou de Signal, faute de sécurité ou d’accréditation. « La plupart des sources sur place n’osent pas parler, et les rares qui osent le faire demandent toujours à rester anonymes », témoigne un reporter africain cité dans le rapport « Dans la peau d’un journaliste au Sahel », publié en avril 2023 par RSF.

La fin d’un regard extérieur

« Le simple fait de parler aux médias vous fait qualifier d’“ennemi du pays” », précise, à Dakar, Sadibou Marong, directeur du bureau de RSF pour l’Afrique subsaharienne. Au Mali, la junte exige un « traitement patriotique de l’information », qui expose aux persécutions les journalistes rendant compte des exactions de l’armée ou de ses liens avec la Russie. « Tous ceux-là (…) qui continuent d’informer pour l’ennemi, ils vont le payer », a averti le colonel Assimi Goïta, autoproclamé chef d’Etat à Bamako. « La liberté de parole n’est plus admise (…). Les partis politiques et les syndicats n’ont plus le droit de manifester. Toute la société a été mise en coupe réglée », a résumé sur RFI, en novembre 2023, Ahmed Newton Barry, figure du journalisme au Burkina Faso, pays longtemps tenu pour exemplaire.

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