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La longue histoire de la ménopause

Bouffées de chaleur, sueurs nocturnes, palpitations, sécheresse vulvo-vaginale, troubles urinaires, fatigue, insomnies, irritabilité, anxiété, douleurs articulaires, risque accru de développer de l’ostéoporose ou une maladie cardio-vasculaire… Cette longue liste de symptômes tient souvent lieu de définition de la ménopause. Marquée par l’arrêt définitif des menstruations, cette étape naturelle du vieillissement biologique peut intervenir tôt ou tard dans la vie d’une femme, de façon abrupte ou progressive. Dans nos sociétés contemporaines, elle est le plus couramment considérée comme un trouble hormonal pouvant faire l’objet d’un suivi médical, parfois d’un traitement.

La ménopause ne peut pourtant être réduite à ces seules manifestations physiques. De la même manière que l’apparition des menstruations signale, dans de nombreuses cultures, l’entrée dans l’âge adulte et, surtout, dans la féminité – menstruations, fertilité et féminité sont souvent inextricablement liées –, la ménopause est généralement vue comme l’un des premiers signes du vieillissement. Or elle peut intervenir très tôt dans la vie d’une personne ; surtout, si à la puberté les menstruations font la femme, que devient celle-ci à l’arrêt de celles-là ?

Ni plus ni moins qu’un fantôme aux yeux de la poétesse américaine Mary Ruefle, comme elle l’écrit dans un texte intitulé Pause et publié dans le recueil My Private Property (Wave Books, 2016, non traduit) : « Que vous soyez attirante ou non, vous aviez pris l’habitude de sentir le regard des autres sur vous pendant que vous attendiez le bus ou que vous achetiez des tampons à la pharmacie. Ils vous regardaient pour déterminer si vous étiez attirante ou non, donc de toute manière, vous étiez regardée. Ce temps-là est révolu ; désormais le regard des autres vous traverse, vous êtes complètement invisible à leurs yeux, vous êtes devenue un fantôme. Vous n’existez plus. »

Toutes les personnes ménopausées, bien sûr, ne partagent pas le point de vue de Mary Ruefle. Néanmoins, qu’elle soit vécue comme une déchéance ou comme une libération, cette expérience démontre combien la ménopause est un phénomène social au moins autant que biologique.

« Il n’est pas question d’invalider les manifestations corporelles qui peuvent advenir à la ménopause, ou de dire que la ménopause n’amène aucune transformation physiologique, précise Cécile Charlap, maîtresse de conférences en sociologie à l’université Toulouse-Jean Jaurès, et autrice de La Fabrique de la ménopause (CNRS Editions, 2019). Mais, si l’on porte un regard analytique sur les descriptions de la ménopause dans les ouvrages médicaux, on voit que celles-ci charrient des représentations sociales qui influent grandement sur la façon dont on perçoit cette période de la vie. »

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