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Gérald Darmanin, un ministre affaibli par la crise politique autour du projet de loi sur l’immigration

Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, visite la caserne de gendarmerie mobile de Calais (Pas-de-Calais), le 15 décembre 2023.

Aux alentours de 18 heures, lundi 11 décembre, alors que l’Assemblée nationale vient de lui infliger un revers cinglant en rejetant le texte du projet de loi sur l’immigration, le téléphone de Gérald Darmanin vibre à plusieurs reprises : la première ministre, Elisabeth Borne, souhaite le voir. Le ministre de l’intérieur, qui n’a pas l’intention de se rendre à Matignon, ne prend même pas la peine de répondre. Et demande à être reçu par Emmanuel Macron, tout juste rentré d’un déplacement à Toulouse. C’est le président qui l’a nommé. En « homme d’honneur », c’est entre les mains du président qu’il doit remettre son destin.

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Ce faisant, Gérald Darmanin ne prend guère de risques. Il sait qu’Emmanuel Macron n’a aucun intérêt à ajouter une crise gouvernementale à une crise parlementaire. Et qu’il n’aime pas agir sous la contrainte, surtout lorsqu’elle vient des oppositions. « Hors de question que vous démissionniez. Laissons le texte poursuivre son chemin », lui lance d’ailleurs le chef de l’Etat lors de leur tête-à-tête, avant de rejoindre d’un pas léger, dans la salle des fêtes de l’Elysée, l’acteur Christian Clavier et ses invités, pour remettre à l’interprète de Jacquouille la Fripouille l’insigne d’officier de la Légion d’honneur.

Gérald Darmanin « a remis sa démission » à Emmanuel Macron, « qui l’a refusée », communique l’Elysée dans la foulée. Le lendemain, en marge du conseil des ministres, ce bon mot circule au sein de l’exécutif : « Sais-tu pourquoi Darmanin a remis sa démission à Macron ?… Parce que Borne l’aurait acceptée ! »

Si la blague traduit la joie mauvaise de certains membres du gouvernement à voir le très clivant locataire de la Place Beauvau un genou à terre, elle en dit long sur les relations très dégradées entre la cheffe du gouvernement et le numéro trois du gouvernement. Ce lundi soir, Emmanuel Macron charge pourtant cet improbable duo de « trouver un chemin » pour sauver le texte rejeté par l’Assemblée nationale quelques instants plus tôt. En janvier 2024, tout sera remis à plat, lâche-t-il en privé, mais, pour l’heure, l’intérêt collectif commande de faire passer le projet de loi sur l’immigration. Pressé de tourner la page de ce psychodrame, Emmanuel Macron veut que l’affaire soit soldée avant les vacances de Noël.

« On sent bien que la balle a été passée »

Un peu plus tard dans la soirée, au cours d’un dîner de la majorité à Matignon convoqué en urgence, Elisabeth Borne confie, en des termes particulièrement crus, son peu d’enthousiasme à l’idée de devoir sauver la mise à Gérald Darmanin. Ce dernier n’est pas davantage allant. Voir celle qu’il prétendait remplacer en juillet prendre les commandes est une deuxième humiliation pour le ministre de l’intérieur, après la claque reçue à l’Assemblée nationale. « Si vous voulez que je parte, et faire un texte avec un autre ministre, faites-le, il n’y a pas de problème », lâche-t-il au cours du dîner, mâchoires serrées. Le mardi soir à l’Elysée, devant les cadres de la majorité, dont la première ministre, Emmanuel Macron insiste : « Il faut qu’il y ait Gérald dans les discussions. »

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