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« Quand on voit comment les fractures se développent en France, on attend que les maisons des jeunes et de la culture soient soutenues. Elles ne le sont pas »

On parle souvent des MJC quand elles vont mal. C’est injuste mais à l’image de leur mission : ingrate, loin des paillettes, sur des terrains rudes, avec des moyens modestes. Les quelque mille maisons des jeunes et de la culture, plantées partout en France, sont au cœur de ce qu’on appelle l’éducation populaire : aider à construire des citoyens, notamment par la création.

Il en existe une, de MJC, doublée d’un centre social, dans le difficile quartier de la Monnaie, à Romans-sur-Isère (Drôme). S’adressant pour beaucoup à des collégiens français issus de l’immigration, elle a pour nom maison citoyenne Noël-Guichard. Son rôle est de faire corps avec le quartier. Alors, elle s’est retrouvée associée au drame de Romans, quand neuf jeunes en majorité originaires de cette cité ont été mis en examen après une violente bagarre, le 18 novembre, au cours de laquelle Thomas, 16 ans, est mort poignardé. Dix jours plus tard, en évoquant les violences à la Monnaie, BFM-TV afficha des images de la MJC.

Les responsables de cette maison, que nous avons joints, savaient bien que ce n’était pas pour parler d’un atelier musique ou cuisine. Mais pour savoir pourquoi ils ont fermé leurs portes du 24 au 29 novembre, le personnel ayant invoqué son « droit de retrait ». Pourquoi un site socioculturel ferme-t-il au moment où le quartier en a le plus besoin ?

Pour protéger le personnel. Sécuriser aussi une maison prise en étau entre « quelques jeunes du quartier ultraviolents » et des « nazillons à l’extérieur ». Les incidents se sont en effet multipliés depuis quelque temps : une salariée agressée, une autre recevant une pierre sur la tête, un départ d’incendie devant la MJC, un caillassage… Durant les émeutes en France en juillet, la directrice de la MJC a dû accourir en soirée afin de protéger le bâtiment. En 2019, trois salles avaient été détruites par un incendie criminel – la bibliothèque, le bureau de l’écrivain public et une salle d’activités.

La directrice de la MJC, Nour El Houda Boukhari, est une enfant du quartier. Le 25 novembre, sur BFM-TV, elle a maladroitement donné l’impression de mettre sur le même plan « un jeune qui est parti » et « des jeunes du quartier qui sont aussi victimes et stigmatisés ». Apparaître à l’écran avec un keffieh autour du cou n’a pas aidé. Surtout aujourd’hui. Elle a reçu des menaces de mort.

« Un manque de considération »

Maire depuis 2014, Marie-Hélène Thoraval (divers droite) dénonce « l’ensauvagement » de la Monnaie, crispant ses habitants, mais sans égratigner la MJC. Du reste, les relations entre les deux parties sont plutôt correctes mais sur le qui-vive. Peu après son élection, la maire a amputé la subvention de 30 % à 40 %, ce qui est énorme. Depuis, l’argent est le même, ce qui correspond à une baisse. La MJC déplore du reste un manque de considération. La ville, elle, reconnaît que cette MJC et sa quinzaine de salariés font du bon boulot, par exemple l’opération « Aux arts citoyens », qui aura lieu le 20 décembre et qui s’inscrit dans un travail de fond sur la mémoire de la cité.

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