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En Argentine, Javier Milei et sa colistière remettent en cause l’existence d’un terrorisme d’Etat durant la dictature

Le candidat à la présidentielle en Argentine Javier Milei et sa colistière Victoria Villarruel, à Buenos Aires,  le 18 octobre 2023.

Le visage est fermé, le ton dur : « Pendant les années 1970, il y a eu une guerre, et pendant cette guerre, les forces de l’Etat ont commis des excès. » Ces quelques mots, prononcés le 2 octobre par le candidat d’extrême droite, Javier Milei, ont scandalisé. Jusqu’ici, aucun politique, depuis le retour de la démocratie il y a quarante ans, n’avait mis en doute l’existence d’un terrorisme d’Etat ayant mené à la disparition de milliers de personnes pendant les années noires de la dictature (1976-1983).

« Parler d’une guerre et d’excès, c’est adopter le discours que les militaires ont tenu pour justifier leurs actes, explique Veronica Torras, directrice de Memoria Abierta, regroupement d’une dizaine d’organisations de défense des droits humains. Depuis 1983, même la droite et les forces armées s’étaient gardées de rompre ce consensus. »

« Compléter » l’histoire

Le choix de la colistière de Javier Milei, opposé, le 19 novembre, lors du second tour de la présidentielle, au candidat du péronisme Sergio Massa, renforce les inquiétudes : Victoria Villarruel, fille, petite-fille et nièce de militaires, est la fondatrice du Celtyv, le Centre d’études légales sur le terrorisme et ses victimes, c’est-à-dire celles des attentats perpétrés pendant les années 1970 par les organisations armées d’extrême gauche.

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La candidate au poste de vice-présidente – qui n’a pas répondu aux sollicitations du Monde – se veut rassurante : elle affirme qu’elle ne soutient pas la dictature et que son seul souci est qu’il y ait une « mémoire complète » qui rende aussi hommage aux victimes de la guérilla. « Je ne prétends pas effacer l’histoire, mais la compléter, et je regrette que ma vision soit qualifiée de fasciste », a-t-elle déclaré à la télévision.

Il y a quelques années, Mme Villarruel avait pourtant tenu le même discours révisionniste que M. Milei à la presse : « Le concept de terrorisme d’Etat est une doctrine politicienne : l’Etat, à la rigueur, commet des abus. » Surtout, elle a, par le passé, affiché son soutien aux militaires accusés de crimes contre l’humanité, en rendant par exemple visite en prison au putschiste Jorge Rafael Videla et à d’autres tortionnaires. Si elle a assuré qu’elle l’avait fait dans le cadre d’un livre paru en 2009, le journaliste Ari Lijalad, du média en ligne El Destape, a montré qu’elle avait continué ses visites au moins jusqu’en 2016.

« Forts éléments néofascistes »

Victoria Villarruel est allée jusqu’à s’en prendre à Estela de Carlotto, présidente des Grands-Mères de la place de Mai, qui cherchent à identifier leurs petits-enfants volés par les militaires. « Carlotto a été un personnage assez sinistre pour notre pays, parce qu’avec son air de gentille mamie, elle a justifié le terrorisme », a prétendu la candidate, proche du parti d’extrême droite espagnol Vox, assurant que la fille de Mme de Carlotto, disparue en 1977 alors qu’elle était enceinte de trois mois, était une « terroriste ».

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