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Haut-Karabakh, Ukraine, Gaza : trois guerres en interaction

A l’échelle du temps et de l’espace, Ukraine, Haut-Karabakh et Gaza constituent trois guerres de proximité. Elles s’appellent et se répondent sur trois petites années (2020-2023) dans un périmètre euroméditerranéen restreint, enjeu d’une nouvelle compétition de puissances. Mais d’un théâtre à l’autre, si ce voisinage frappe par son incandescence, la convergence de ces guerres relève plus du champ des nouvelles conflictualités que d’une simple représentation géopolitique classique.

Ces trois crises renvoient à la catégorie des « guerres existentielles » qui relient leurs peuples à un traumatisme collectif : Shoah chez les Israéliens, Nakba chez les Palestiniens, Holodomor chez les Ukrainiens et Medz Yeghern (« grand carnage ») chez les Arméniens. La mémoire des génocides et autres tragédies traverse les esprits et les générations. Mais, au-delà de ce passé, ces guerres de survie soulèvent la question de l’Etat-protecteur des populations et de l’Etat-garant de son propre avenir.

Ukrainiens, Arméniens et Israéliens s’interrogent sur les faillites de la sécurité nationale et sont pris de vertige : plus l’Etat est bousculé, plus les tragédies du passé remontent, plus la guerre devient existentielle et plus elle ébranle les fondements de l’Etat. L’image est également sombre s’agissant des Palestiniens, otages pour la majorité d’entre eux des terroristes du Hamas et dépourvus de toute couverture institutionnelle crédible. Pour la Russie et l’Azerbaïdjan, la question ne relève pas de leur survie en tant qu’Etat, mais d’une (ré) affirmation de puissance au cœur d’un monde déréglé.

L’agenda pénal international se remplit

Car ces trois guerres voisines révèlent l’atonie du système international, où la concertation multilatérale est à son plus bas niveau et où le droit international et son versant humanitaire sont violés : agression russe contre l’Ukraine, nettoyage ethnique dans le Haut-Karabakh, attaque terroriste contre des populations israéliennes et bombardements frappant des civils palestiniens. Crimes de guerre et contre l’humanité s’additionnent : l’agenda de la justice pénale internationale se remplit, alors que l’ordre mondial est de plus en plus incertain.

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Cette remise en question de l’architecture de la paix post-1945, avec un Occident qui doute de lui-même et le reste du monde qui croît en ses chances, place aux premières loges de ces trois conflits un triangle néo-impérial – Turquie, Russie, Iran – dont la vocation est d’étendre son influence jusqu’à réactualiser la guerre territoriale. Or, ces trois conflits cousins vont bien au-delà du territoire. Ici, ce dernier ne sert que de faire-valoir et ce sont bien des guerres identitaires qu’actionnent ou téléguident en partie Ankara, Moscou et Téhéran.

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