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Grandir avec des parents plus vieux que la moyenne : « Quand ils venaient me chercher, mes camarades pensaient qu’il s’agissait de mes grands-parents »

Image tirée du travail de la photographe suisse Sabine Hess, publié dans son livre « You Felt the Roots Grow » (Ciao Press and Witty Books, 2023).

Devant le portail de l’école, les parents de Lila (certains témoins ont souhaité garder l’anonymat) étaient reconnaissables à leurs cheveux gris. « Quand ils venaient me chercher, mes camarades pensaient qu’il s’agissait de mes grands-parents », se rappelle la jeune fille de 18 ans. Sa mère a 62 ans. Son père 67. Longtemps, elle a menti sur leur âge. « Maintenant, je ne le fais plus », assure l’étudiante en première année de fac de langues.

Lila a choisi une autre voie que ses parents : son père était policier et sa mère travaillait comme infirmière. Des métiers dont elle parle au passé parce qu’ils sont tous deux retraités. Son père était âgé de 49 ans lorsqu’elle est née. « Pourtant, c’est celui qui s’est le plus occupé de nous », dit-elle en évoquant sa fratrie, sans mentionner sa mère, avec laquelle elle entretient des relations tendues.

Lila le répète : avoir des parents plus vieux que la moyenne « n’a pas d’avantages ». Benjamine de la famille, l’adolescente grandit avec le sentiment d’être arrivée trop tard. En cause, selon elle, la dizaine d’années qui la sépare de ses deux frères aînés et de sa sœur : « Ils ont beaucoup voyagé avec mes parents quand ils étaient petits. J’étais un peu peinée lorsqu’ils racontaient leurs anecdotes. Moi, je n’en avais aucune. » Entre leur premier et leur dernier enfant, ses parents ne disposent plus du même budget. Et leur énergie s’estompe. Lila voyagera moins et apprendra à s’évader autrement : basket, lecture ou piano. « Je leur en ai longtemps voulu de ne pas être aussi jeunes que les autres », avoue-t-elle.

Qu’est-ce qu’un parent comme les autres ? La médecine place le curseur à 35 ans, limite à partir de laquelle une femme enceinte est en « grossesse gériatrique ». « Un terme extrêmement violent », soutient Anaïs Le Brun-Berry, psychanalyste et consultante en parentalité. Dans son cabinet du 9e arrondissement de Paris, elle reçoit des mères qui culpabilisent d’avoir eu un enfant après 40 ans. « Il y a cette idée qu’un parent plus âgé sera moins “en capacité de”. Et que l’enfant pourra le ressentir et en éprouver de la honte s’il compare ses parents à ceux de ses copains », estime-t-elle.

Démodés, incompétents… Les parents âgés n’ont pas la cote. En témoigne le film Old Dads, du comédien américain de stand-up Bill Burr (2023, sur Netflix), où trois boomeurs proches de la cinquantaine découvrent la paternité sur le tard. Dans une ambiance testostéronée, ils se heurtent à un décalage générationnel avec les autres parents. Le personnage principal, Jack Kelly, inculque à son petit garçon des principes machistes. L’enfant se fait mal ? Son père lui conseille de mettre de la terre sur sa blessure. « J’essaie d’en faire un mec, pas une tafiole », dira-t-il plus tard à un voisin qui lui recommandait prudemment de désinfecter la plaie.

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