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La double faute de l’Union européenne dans la gestion de la crise grecque, au début des années 2010

Le gouverneur de la Banque de Grèce, Yannis Stournaras, à Athènes, le 1er avril 2019.

Yannis Stournaras, le gouverneur de la banque centrale grecque, a une jolie expression : « Pour l’Europe, la Grèce a été la sage-femme de l’Histoire. » Comprendre : c’est à cause de la crise grecque que l’Union européenne (UE), et en particulier la zone euro, a dû se réformer en profondeur. C’est parce que la faillite de ce pays de 10 millions d’habitants a été mal gérée par les autorités européennes qu’il a fallu tout réinventer : un fonds de sauvetage des pays en détresse a été créé (le Mécanisme européen de stabilité, MES), ainsi qu’un fonds de sauvetage des banques (Fonds de résolution unique, FRU), tandis que la Banque centrale européenne (BCE) – dont le conseil des gouverneurs se réunit très symboliquement à Athènes, le 26 octobre – est devenue beaucoup plus interventionniste.

M. Stournaras, qui était ministre de l’économie de 2012 à 2014, est le premier à le reconnaître : « La faute initiale de la crise était celle des Grecs. » A partir de 2002, quand la Grèce a rejoint la zone euro, le pays a pu emprunter à des taux d’intérêt bas, largement inférieurs à ce qu’ils auraient été dans une monnaie séparée. Le gouvernement a en profité pour dépenser aveuglément, jusqu’à se retrouver, en 2009, avec un gigantesque déficit budgétaire de 15 % du produit intérieur brut (PIB), non sans avoir voulu maquiller les comptes dans un premier temps. « Contrairement à d’autres pays, ce n’était pas une crise bancaire, mais entièrement un problème venant du secteur public », poursuit M. Stournaras.

Mais à cette crise initiale, l’UE a réagi avec deux profondes erreurs, estime Georges Papaconstantinou, ministre de l’économie de 2009 à 2011. La première est d’avoir laissé le feu se propager à d’autres pays de la zone euro : Irlande, Portugal, Espagne, Chypre… « Les investisseurs voulaient une garantie que l’Europe ne laisserait pas un pays faire défaut sur sa dette, explique-t-il. Ils espéraient que la BCE agirait en tant que prêteur en dernier ressort et interviendrait sur les marchés en achetant de la dette des pays en difficulté. » Jean-Claude Trichet, alors président de la BCE, a refusé. « Il a dit aux gouvernements de faire leur travail et de mettre en place des mécanismes de sauvetage. »

Austérité gigantesque

Cette inaction de la BCE a paniqué les investisseurs et a amplifié la crise. Deux ans plus tard, en juillet 2012, Mario Draghi, son successeur à la tête de l’institution, en tirait les conclusions. En annonçant qu’il agirait « quoi qu’il en coûte » (« whatever it takes ») pour sauver l’euro, il a de facto transformé l’institution en prêteur en dernier ressort. « Il n’est cependant pas sûr que le même discours prononcé par Trichet en 2010 aurait marché », modère M. Papaconstantinou. Entre les deux, l’UE avait commencé à se réformer, et l’ancêtre du MES avait été créé.

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