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La guerre entre Israël et le Hamas contraint Erdogan à jouer les équilibristes

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, lors de la réunion du groupe de son parti, l’AKP, à Ankara, le 11 octobre 2023.

Il aura fallu trois jours de siège de Gaza par l’armée israélienne et de frappes sur l’enclave palestinienne pour que le président turc Recep Tayyip Erdogan élève la voix et dénonce les « méthodes honteuses » de l’Etat hébreu. « Bombarder des localités civiles, tuer des civils, bloquer l’aide humanitaire et tenter de présenter cela comme des exploits ne peut être que le réflexe d’une organisation et non d’un Etat », a affirmé M. Erdogan, qui utilise d’ordinaire le terme « organisation » pour qualifier le Parti des travailleurs du Kurdistan, classé comme terroriste par Ankara et ses alliés occidentaux. Il a ajouté, devant les élus de son parti, mercredi 11 octobre, à Ankara, qu’« Israël ne devait pas oublier que s’il se conduit comme une organisation plutôt que comme un Etat, il finira par être traité comme tel ».

Le ton est somme toute modéré, compte tenu des sorties auxquelles l’homme fort d’Ankara avait fini par habituer ses interlocuteurs sur la question palestinienne. Comment, en effet, ne pas se souvenir du Recep Tayyip Erdogan accusant son homologue, Benyamin Nétanyahou, et l’Etat hébreu de « conserver en vie l’esprit de Hitler » lors de la guerre de Gaza, en 2014, ou condamnant Israël pour son « terrorisme d’Etat » et un « génocide » quatre ans plus tard ? Et de cette scène marquante, en pleine séance plénière du sommet économique de Davos, en janvier 2009, où l’on a vu le dirigeant turc tancer le président israélien Shimon Pérès, pourtant notoirement proturc et accessoirement prix Nobel de la paix, l’accusant de « savoir très bien tuer les gens » ?

Mais la conjoncture a changé, emportant les colères les plus vives du président turc. Ankara a aujourd’hui grand besoin de ses voisins et en particulier d’Israël. Confronté à un isolement diplomatique croissant et à des difficultés économiques vertigineuses, Recep Tayyip Erdogan a commencé à afficher publiquement sa volonté de rapprochement avec Tel-Aviv à la fin 2020. Après des années de brouilles, d’invectives et de claquements de portes, le président turc, qui n’a eu de cesse de se s’afficher comme un défenseur de la cause palestinienne, s’est engagé dans une politique de la main tendue et, par là même, dans une difficile position d’équilibriste dans la région, un peu comme il tente de le faire, parfois avec succès, en Ukraine.

Gisement de gaz

Tout en maintenant des liens étroits avec le Hamas, la Turquie a annoncé, à l’été 2022, après plus de dix ans de « gel », un rétablissement complet de ses relations diplomatiques avec Israël et le retour des ambassadeurs dans les deux pays. Quelques semaines auparavant, le président israélien, Isaac Herzog, s’était rendu à Ankara, avant que le ministre des affaires étrangères turc de l’époque, Mevlüt Çavusoglu, n’aille en visite en Israël. Les relations entre les services de renseignement israéliens et turcs s’étaient renforcées à la faveur de révélations de menaces terroristes émanant d’Iran et visant des touristes israéliens en Turquie. Ce geste avait été salué par Yaïr Lapid, alors ministre israélien des affaires étrangères.

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