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Pascal Demurger, l’assureur militant qui bouscule le patronat

Pascal Demurger, directeur général de la MAIF, à Paris, le 3 octobre 2023.

Un bonimenteur ? Un gentil idéaliste ? Un traître à la cause des entreprises ou un courageux visionnaire ? On peut tout dire de Pascal Demurger, mais certainement pas que le bonhomme n’aime pas les positions inconfortables ni les missions impossibles. Comme celle, par exemple, de faire entrer des ronds dans des carrés. Ou, ce qui revient presque au même, de lutter contre l’effondrement programmé de la planète, tout en restant les deux pieds dans l’économie capitaliste. Lui est convaincu que le système peut être changé de l’intérieur. Qu’il n’y a pas besoin de sonner la révolution, qu’on peut avancer pas à pas, à condition de se retrousser les manches.

A la tête de la MAIF, Pascal Demurger, 59 ans, est un patron qui dit ce que ses homologues n’aiment pas entendre. Que la seule logique de maximisation du profit n’est plus compatible avec la lutte contre le réchauffement climatique. Qu’il est temps que les entreprises pensent au partage de la valeur quand les revenus des dividendes ont augmenté, ces dix ­dernières années, de 70 % contre seulement 20 % pour les salaires. Pascal Demurger a un programme mais pas de troupes.

En mars, il a pris la coprésidence du petit mouvement Impact France, qui regroupe quinze mille entreprises de l’économie sociale et solidaire, dans le but de le sortir de la semi-clandestinité. Le 20 octobre, il a rendez-vous avec Elisabeth Borne à Matignon pour lui vendre une idée qui hérisse le poil du Medef : conditionner les baisses d’impôts (et, plus largement, toutes les aides publiques) à un ­comportement socialement et écologiquement responsable des entreprises.

Il souhaite que le gouvernement réserve la baisse prévue de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, soit 1 milliard d’euros pendant quatre ans, uniquement aux entreprises qui ont publié leur bilan carbone (seulement 43 % des entreprises de plus de cinq cents salariés respectent cette obligation). « On pourrait dire que ce n’est pas grand-chose, mais c’est plus qu’il n’y paraît. On veut créer une première rupture symbolique dans notre politique fiscale », plaide-t-il.

« Culturellement de droite et politiquement de gauche »

Convaincu que ce genre de mesure est populaire dans l’opinion, il dit avoir bon espoir que le gouvernement reprenne son projet d’amendement. C’est loin d’être gagné. La gauche sous François Hollande s’était fracturée sur cette question. Déjà, Emmanuel Macron, alors ministre de l’économie, ne voulait pas en entendre parler.

« Même si on peut partager l’objectif de ce genre de mesure, je crains qu’on ne crée des usines à gaz et qu’on rate à la fois l’objectif de réindustrialisation et la décarbonation », estime le ministre délégué chargé de l’industrie, Roland Lescure, qui connaît Pascal Demurger depuis plusieurs années. Une quasi-fin de non-recevoir, qui ne l’empêche pas de lui tresser des louanges : « C’est plus facile de porter son discours quand vous êtes assureur que sidérurgiste. Mais si tous les patrons étaient comme lui, la France serait plus apaisée, la planète probablement en meilleur état, et je ne suis même pas sûr que la performance des entreprises serait moins bonne. »

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