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Les syndicats, un rempart fragile contre l’extrême droite

Manifestation à Lille, le 17 mars 2023.

Lors de son premier tête-à-tête avec Emmanuel Macron, le 29 août, Sophie Binet l’a mis en garde. La nouvelle secrétaire générale de la CGT a insisté sur le fait que « son action risquait de contribuer à l’arrivée au pouvoir du Rassemblement national [RN] en 2027 ». « A force de ne pas tenir compte de l’avis des organisations de salariés, et de l’opinion, a-t-elle ajouté, selon ses dires, beaucoup de femmes et d’hommes vont considérer qu’il n’y a pas d’autre alternative que Marine Le Pen. » Au sein de l’intersyndicale dite « G8 » (CFDT, CGT, FO, CFTC, CFE-CGC, UNSA, FSU, Solidaires), qui a bataillé en vain pour obtenir le retrait de la réforme des retraites, l’échec a été cruellement ressenti, et beaucoup redoutent le scénario catastrophe d’une victoire de l’extrême droite à la présidentielle de 2027.

Depuis des années, les syndicats relèvent, lors des scrutins présidentiels, une progression, qui semble irrésistible, du vote de leurs sympathisants – à l’image de l’électorat populaire – en faveur de l’extrême droite. En 2022, selon un sondage sorti des urnes d’Harris Interactive, Mme Le Pen a recueilli 31 % des suffrages chez les sympathisants de FO (+ 7 points par rapport à 2017), 29 % à la CFTC (+ 15), 22 % à la CGT (+ 7), 19 % à l’UNSA (+ 5), 17 % à la CFE-CGC (+ 4), 15 % à la CFDT (+ 8), 14 % chez Solidaires (+ 1) et 10 % à la FSU (+ 1).

Un résultat d’autant plus paradoxal que l’extrême droite devrait faire figure d’épouvantail tant elle a affiché avec constance à l’égard du syndicalisme une hostilité qui puise ses racines dans l’idéologie du régime de Vichy. Celui-ci avait interdit les syndicats et promulgué la Charte du travail, en octobre 1941, avec l’ambition de « rompre définitivement avec le vieux système de lutte de classe ». En 2007, le programme du Front national (FN) dénonçait un syndicalisme « dévoyé et moribond (…), un des obstacles majeurs aux réformes nécessaires de la société française ».

Syndicalistes débauchés

En 2017, comme en 2022, Mme Le Pen a prôné « une grande réforme des syndicats », avec des mesures dignes de la conservatrice britannique Margaret Thatcher : vote préalable des salariés à tout arrêt de travail et interdiction des piquets de grève. « Les syndicats, a renchéri Louis Alliot, maire RN de Perpignan, en août 2022, sont les croque-morts du monde économique et du travail, ils ne servent à rien. » Et en octobre 2022, le RN a déposé un amendement, rejeté, pour interdire aux étrangers de se présenter aux élections professionnelles. Pour son autrice, Laure Lavalette, députée du Var (RN), il s’agissait d’« éviter toute tentative d’ingérence étrangère ou de revendication communautariste ».

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