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Olivier Rozenberg, politiste : « Le Sénat est le poil à gratter du macronisme »

Alors que 170 sénateurs voient leurs sièges remis en jeu dimanche 24 septembre, Olivier Rozenberg, politiste et chercheur au Centre d’études européennes et de politique comparée de Sciences Po, observe que le Sénat a vu son rôle conforté ces dernières années. Les raisons sont multiples : la loi sur le non-cumul des mandats de 2014, la perte d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale en 2022 ou encore le travail des sénateurs de contrôle de l’exécutif depuis l’affaire Benalla en 2018.

Beaucoup d’élus locaux disent que les députés délaissent le travail de circonscription, pour se consacrer à la fabrique de la loi à Paris. Ils estiment que les sénateurs sont leurs derniers représentants. Avec le non-cumul des mandats depuis 2014, une bascule se serait produite. Comment l’analysez-vous ?

Plusieurs éléments peuvent expliquer cette perception. Tout d’abord, les élus locaux élisent les sénateurs, lesquels naturellement les traitent bien, avec égard et considération. Les députés, désignés par le peuple au suffrage direct, ne sont pas dans cette situation.

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Ensuite, on peut y voir une conséquence du renouvellement de l’Assemblée nationale. Celle élue en 2017 comptait trois quarts de nouveaux députés. Et, en 2022, la moitié a encore été renouvelée. Leur profil est différent de celui de leurs prédécesseurs. Il y a parmi eux moins d’anciens élus locaux, davantage de novices, d’une part, et d’anciens membres de cabinet ou de collaborateurs parlementaires, d’autre part.

Au Sénat, en revanche, tout le monde est issu des collectivités territoriales. Les sénateurs sont des élus locaux qui ont réussi. De fait, ils connaissent très bien les institutions du terrain, et ceux qui les font vivre car ils travaillent avec eux depuis dix, vingt, trente ans…

Et ils ont la même étiquette politique…

C’est la troisième explication. La vie politique locale est en adéquation avec la composition du Sénat : 62 % des sièges y sont occupés par Les Républicains ou par le Parti socialiste, les anciens partis de gouvernement. A l’Assemblée nationale, leur part n’est que de 15 %. Les partis qui dominent au Palais-Bourbon ont un ancrage local extrêmement réduit, qu’il s’agisse des macronistes, des députés La France insoumise ou Rassemblement national.

Depuis 2022, la nature frontale, voire agressive, des débats à l’Assemblée peut-elle également avoir un impact ?

C’est surtout une question d’image, car beaucoup de ces nouveaux députés cherchent justement à jouer le jeu de la circonscription. Mais les élus locaux, qui soutiennent les partis de gouvernement traditionnels, peuvent avoir des réticences à collaborer avec les parlementaires qui représentent les extrêmes. Tout simplement parce qu’ils ne partagent pas leurs idées, et qu’ils peuvent craindre d’être associés à eux. En revanche, un sénateur de centre droit ou de centre gauche peut paraître plus rassurant.

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