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Le gouvernement se compare à l’Allemagne pour consoler les Français

Le chancelier allemand, Olaf Scholz, accueille Bruno Le Maire, ministre français de l’économie et des finances, au début de la réunion du cabinet fédéral, à Berlin, le 13 septembre 2023.

« C’est quoi cette Schadenfreude ? », s’étrangle un grand patron allemand présent dans la salle. L’expression, couramment utilisée ces temps-ci outre-Rhin, désigne le fait de se réjouir du malheur d’autrui. Lorsque le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, monte sur l’estrade des Rencontres franco-allemandes d’Evian (Haute-Savoie), le 7 septembre, il en profite pour rappeler, une fois de plus, les bonnes performances de l’économie française. Les chefs d’entreprise allemands apprécient moyennement ; tous s’inquiètent des signes d’essoufflement de la première économie de la zone euro.

Fragilisée par sa grande dépendance au gaz russe et au marché chinois, ainsi que par les dysfonctionnements de la coalition au pouvoir, l’Allemagne prend, depuis la guerre en Ukraine, conscience des limites de son modèle. Elle n’est pas la seule. « L’Allemagne est-elle à nouveau l’homme malade de l’Europe ? », titrait à la mi-août l’hebdomadaire britannique The Economist, reprenant la célèbre formule qui avait fait sa « une » en 1999.

Depuis que l’Allemagne a basculé dans la récession au début de l’année, l’exécutif français ne résiste pas au jeu de la comparaison. « La France est en train de devenir la locomotive de l’Europe », répétait Bruno Le Maire sur LCI, le 12 septembre, soulignant ses « résultats économiques exceptionnels », quelques jours après que l’Allemagne a confirmé la contraction de son activité au deuxième trimestre.

« L’année 2023 s’annonce difficile, on peut légitimement être inquiet, en particulier de la récession chez nos amis allemands », avait déjà appuyé le ministre, fin août, à l’université d’été du Medef, après avoir assuré quelques semaines plus tôt sur Radio J ne pas vouloir « gagner un match contre l’Allemagne ». Même Emmanuel Macron a eu du mal à s’abstenir devant ses ministres, réunis en séminaire le 6 septembre. « Vous êtes des ministres chanceux, dans un pays qui n’est ni en récession ni en cure d’austérité », a souligné le président de la République, sans nommer son puissant voisin.

Obsession française ancienne

Un éditorial flatteur de l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, le 5 septembre, vantant les succès de l’économie hexagonale – « la France, c’est l’Allemagne en mieux » –, est venu valider l’argumentaire. « Je n’aurais jamais pensé voir les mots “miracle économique” et “France” dans la même phrase, on ne va pas bouder son plaisir ! », s’est félicité devant la presse Bruno Le Maire, mercredi 13 septembre à Berlin, où il était venu plaider en faveur d’une « stratégie industrielle » européenne avec ses homologues allemands des finances et de l’économie, respectivement Christian Lindner et Robert Habeck. Quelques heures plus tôt, s’exprimant dans la langue de Goethe, il avait parlé de Zeitenwende (« changement d’époque ») devant le conseil des ministres allemand.

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