Close

Le placenta fait barrière aux virus en singeant l’ennemi

Chez l’humain et les autres mammifères placentaires, la gestation constitue un moment singulier au cours duquel un nouvel organisme se développe, hébergé et nourri par le corps maternel. Durant cette période, le placenta assure un double rôle dans la mise en relation des deux organismes : celui d’une interface d’échange qui permet la nutrition et la respiration du fœtus ainsi que l’élimination de ses déchets métaboliques ; et celui d’une barrière protectrice, s’opposant à la transmission de pathogènes de la mère à l’enfant.

Lorsque cette barrière est intacte, elle évite aux mères infectées par les virus de l’herpès ou du sida, par exemple, de les transmettre au fœtus, dont le système immunitaire n’est pas encore développé. Lorsqu’elle est mise en échec, en revanche, les conséquences pour le développement embryonnaire peuvent être désastreuses. Les microcéphalies dues à l’infection par le virus Zika pendant la grossesse en sont une illustration tragique.

A l’interface placentaire, chez la souris comme chez l’homme, les cellules fœtales pénètrent profondément dans les tissus maternels, jusqu’au contact direct du sang. Si cette interaction intime accroît l’efficacité des échanges, elle augmente également les risques de transmission d’éventuels pathogènes. Une ligne de défense active s’y oppose toutefois, sous la forme d’une production continue de molécules spécialisées dans la communication entre cellules lors d’infections : les interférons, ici « de type III ».

Transcription constante et en très grande quantité

La concentration élevée de ces interférons a pour effet de mettre en œuvre des défenses antivirales puissantes. Mais pourquoi ces interférons sont-ils produits abondamment à cet endroit précis, même en l’absence de toute infection ? L’équipe dirigée par Hana Totary-Jain, à l’université de Floride du Sud, s’est attachée à le comprendre. Dans une étude publiée en juillet dans la revue Cell Host & Microbe, Ishani Wickramage, Jeffrey VanWye et leurs collaborateurs ont mis en évidence que l’induction des interférons de type III est entretenue par une spécificité des cellules placentaires fœtales : la transcription constante et en très grande quantité de certains ARN à partir d’une région dédiée du génome, située sur le chromosome 19 chez l’homme, sur le chromosome 2 chez la souris. Les auteurs ont pu préciser que ces ARN appartenaient à une classe particulière d’éléments mobiles du génome : des rétrotransposons.

Dans la plupart des tissus de l’organisme, ces éléments, dont la propriété de « sauter » d’une région à l’autre est potentiellement mutagène lorsqu’ils s’activent, sont maintenus silencieux. En revanche, dans un organe voué à être éliminé après quelques mois, comme le placenta, leur caractère mutagène ne constitue plus un risque pour l’organisme. L’étude révèle que certains de ces éléments y sont abondamment transcrits, dans les deux sens de lecture du génome.

Il vous reste 24.33% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

source

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 Comments
scroll to top