Close

Réforme de l’assurance-chômage : Gabriel Attal confirme un durcissement des règles

Le premier ministre, Gabriel Attal, à Valence, le 24 mai 2024.

C’est à partir du 1ᵉʳ décembre que les règles d’indemnisation de l’assurance-chômage seront durcies, a annoncé le premier ministre, Gabriel Attal, dans une interview à La Tribune dimanche, samedi 25 mai. L’objectif, selon lui, est d’« aller vers le plein-emploi » et de « valoriser encore plus le travail ».

La durée d’indemnisation sera réduite de dix-huit à quinze mois « dans les conditions actuelles », c’est-à-dire si le taux de chômage se maintient en dessous de 9 %, pour les chômeurs de moins de 57 ans. Actuellement, les salariés âgés de 53 et 54 ans peuvent être indemnisés jusqu’à 22,5 mois, et ceux âgés de 55 ans et plus jusqu’à 27 mois. Le premier palier disparaîtra, et le bénéfice d’une indemnisation plus longue sera réservé aux chômeurs âgés de 57 ans et plus.

En outre, il faudra avoir travaillé huit mois sur les derniers vingt mois pour être indemnisé, contre six mois au cours des vingt-quatre derniers mois actuellement, a précisé le chef du gouvernement. Ces éléments confirment les pistes données cette semaine aux partenaires sociaux par la ministre du travail, Catherine Vautrin.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Catherine Vautrin, ministre du travail à temps partiel

En ce qui concerne la mensualisation, au lieu d’être calculée en fonction du nombre de jours dans le mois (entre 28 et 31), l’allocation versée devrait à l’avenir être la même tous les mois pour un chômeur n’ayant pas travaillé sur la période, sur une base de 30 jours. Cela fera perdre cinq ou six jours d’indemnisation aux chômeurs n’ayant pas travaillé sur une année entière.

Gabriel Attal a précisé que le gouvernement allait prendre un décret le 1ᵉʳ juillet pour que la réforme « puisse entrer en vigueur le 1ᵉʳ décembre ». Changer les règles d’indemnisation nécessite une mise à jour des systèmes d’information de France Travail (ex-Pôle Emploi) qui ne peut être faite du jour au lendemain.

Un bonus-malus sur les contrats courts à l’examen

Le premier ministre a dit vouloir que « la proposition des partenaires sociaux de créer un CDI senior soit étudiée » et demandera Mme Vautrin « de lancer des négociations après l’été, pour un texte de loi d’ici à la fin de l’année ».

Afin d’inciter les seniors au chômage à reprendre un emploi, le gouvernement crée un « bonus emploi senior » pour accompagner la reprise d’emploi. Grâce à cette mesure « un senior au chômage qui reprendra un emploi moins bien rémunéré que son emploi précédent pourra cumuler son nouveau salaire avec son allocation de chômage » et « retrouvera ainsi sa rémunération initiale, pendant un an », a expliqué Gabriel Attal. Ce complément versé par l’assurance-chômage permettra de compenser le manque à gagner pour les salaires jusqu’à 3 000 euros.

Le système de bonus-malus sur les contrats courts fera, lui, l’objet d’un examen sur « l’opportunité de l’étendre ». Promesse de campagne d’Emmanuel Macron en 2017, le bonus-malus est un dispositif vivement contesté par le patronat qui vise à lutter contre l’abus de contrats courts. Il concerne actuellement les entreprises de onze salariés et plus dans sept secteurs très consommateurs de contrats courts (comme l’hébergement et restauration ou les transports et entreposage).

Il s’agit de moduler la contribution patronale d’assurance-chômage − 4,05 % de la masse salariale − à la hausse (malus) ou à la baisse (bonus) en fonction « du taux de séparation » des entreprises, comparé au taux médian de leur secteur.

Newsletter

« Politique »

Chaque semaine, « Le Monde » analyse pour vous les enjeux de l’actualité politique

S’inscrire

Gabriel Attal a ainsi annoncé qu’il chargeait Catherine Vautrin « de mener une concertation pour identifier les secteurs qui auront vocation à entrer dans ce système et à quel rythme ». Reçu par la ministre du travail cette semaine, le président du Medef, Patrick Martin, avait affiché son « soutien à la réforme », tout en se disant opposé « à une généralisation ou même à une simple extension du bonus-malus ».

Une réforme jugée « criminelle » par la CGT

En vertu du principe de « contracyclicité », qui s’applique depuis février 2023, la durée d’indemnisation des chômeurs est réduite de 25 % lorsque le taux de chômage reste en dessous de 9 %. Ce taux est actuellement de 7,5 %. Cette modulation sera renforcée si le taux de chômage descend en dessous de 6,5 %, ce qui permettrait de dégager de l’ordre de 3 milliards d’euros d’économies supplémentaires. La durée d’indemnisation des chômeurs de moins de 57 ans serait alors réduite de 40 %, passant à douze mois maximum.

« Pour préparer le rebond économique de 2025 que nous annoncent les prévisionnistes, je souhaite que les règles soient encore plus incitatives quand la croissance repartira davantage et que le taux de chômage diminuera », a encore dit Gabriel Attal. Pour le premier ministre, « ce n’est pas une réforme d’économie, mais de prospérité et d’activité ». « Le gain se mesurera par un nombre plus important de Français qui travailleront. Et donc plus de financements pour notre système », a-t-il assuré.

Selon le ministère du travail, le gouvernement attend de la réforme 3,6 milliards d’euros d’économies et projette une augmentation « de 90 000 [du] nombre de personnes en emploi ».

Le durcissement de la condition d’affiliation générerait à lui seul 2,8 milliards d’économies, selon la CGT. « C’est vraiment une mesure antijeunes », a réagi Denis Gravouil, le négociateur sur l’assurance-chômage de la centrale de Montreuil, pour qui l’absence de décision d’extension sur le bonus-malus montre que « le gouvernement est totalement aligné sur les intérêts du patronat ».

Reprenant les mots utilisés selon lui par la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, devant Catherine Vautrin, il a jugé que la réforme était « criminelle », citant des études sur la santé des chômeurs et de leur entourage qui montrent « le taux de suicide des chômeurs en fin de droits est deux fois plus élevé que dans la population en emploi ».

« L’objectif, ce n’est pas l’incitation, le retour à l’emploi, puisqu’il n’y a aucun lien avec le fait de réduire les droits à ce point », a estimé pour sa part Olivier Guivarch, de la CFDT. Pour le négociateur du premier syndicat, cela « confirme que l’objectif était financier ». Au gouvernement, « ils partent d’une somme qu’ils doivent trouver et ils regardent quelles sont les mesures qui peuvent produire cette baisse de dépenses assez rapidement », au risque d’« obliger certaines personnes à prendre des emplois de mauvaise qualité, des contrats courts, de cumuler des emplois » pour s’en sortir.

Le Monde avec AFP

Réutiliser ce contenu

source

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

0 Comments
scroll to top