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Le cinéma français se rassure à Angoulême

La réalisatrice française Katell Quillévéré (« Le Temps d’aimer »), au Festival du film francophone d’Angoulême, le 23 août 2023.

Juriste, conseiller d’Etat, Olivier Henrard n’est pas du genre à se taper sur les cuisses en public. Pourtant, sur la scène du théâtre d’Angoulême, ce mardi 22 août pour l’ouverture du festival du film francophone, le directeur général du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), n’en est pas loin. « Le cinéma français va bien et même très bien, affirme-t-il, enthousiaste. La fréquentation depuis le début de l’année est de 10 % seulement en dessous de la situation d’avant la crise et certains mois, comme en juillet, elle a été de 10 % supérieure. Elle est notamment portée par les films français qui représentent 40 % des billets de cinéma vendus. »

Manuel Alduy, le monsieur cinéma de France Télévisions, en convient : « Ça fait plaisir. » On le retrouve le lendemain tout sourire malgré la canicule étouffante. « Ces chiffres sont d’autant plus rassurants qu’ils montrent un engouement du public sur des propositions qu’on n’avait plus vues depuis longtemps. »

Il y a deux paramètres sur lesquels le monde de la production et de la distribution cinématographiques a les yeux fixés : la part de marché globale, et le nombre de films « millionnaires » – comprendre : qui ont fait plus d’un million d’entrées. Or sur ces deux dimensions, le baromètre français semble au beau fixe. Palme d’or française à Cannes, avec Anatomie d’une chute de Justine Triet, ours d’or français à Berlin, avec Sur L’Adamant de Nicolas Philibert… Le cinéma d’auteur se porte bien. « Un quart des films sélectionnés dans les dix plus grands festivals du monde sont français », souligne justement le directeur général du CNC.

« Une situation qu’on n’a pas connue depuis des années »

C’est en effet la surprise des bons scores annoncés : ils ne sont pas uniquement liés aux blockbusters commerciaux (Astérix et Obélix de Guillaume Canet, Alibi 2 de Philippe Lachaud ou Les Trois Mousquetaires de Martin Bourboulon…). En cette fin août, on compte déjà parmi les films « millionnaires » : Tirailleurs, de Mathieu Vadepied, Je verrai toujours vos visages de Jeanne Herry, Mon crime de François Ozon ou Sur les chemins noirs de Denis Imbert. Derrière, Jeanne Du Barry de Maïwenn est déjà à 750 000, et L’amour et les forêts de Valérie Donzelli, à 650 000. Sans parler des 300 000 spectateurs au cœur de l’été pour la surprise Yannick de Quentin Dupieux, comédie tournée en six jours. « C’est une situation qu’on n’a pas connue depuis des années », s’exclame un distributeur.

Lire l’entretien avec Quentin Dupieux : Article réservé à nos abonnés Quentin Dupieux, réalisateur de « Yannick » : « Devenir professionnel, c’est ma hantise »

« Hum… Je ne suis pas dans le cocorico, tempère le producteur Jean-Louis Livi, figure historique du cinéma français. Bien sûr il y a des progrès. On a cru que le Covid avait enterré le cinéma, il ressuscite. Mais je pense que nous sommes passés – que je suis passé – d’un cinéma de l’âge d’or à un cinéma de résistance. Face à l’algorithme [la menace de l’intelligence artificielle est ici sur toutes les lèvres], on revient aux fondamentaux du cinéma : l’artisanat, la découverte, l’artiste, l’émulation, la singularité… » Neveu d’Yves Montand, « fils de communiste et fier de l’être », fondateur de la célèbre agence artistique Artmedia, Jean-Louis Livi parle mezzo voce : « J’ai fait des succès et aussi des bides. Il faut être un peu cinglé pour faire ce métier. Et prétentieux. La prétention de produire le film qui va fonctionner. Vous rendez-vous compte de ce que nous portons comme responsabilité ? »

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