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Un apéro avec Ana Girardot : « J’ai adoré être une connasse ! »

Ana Girardot au café Les Philosophes, à Paris, le 1ᵉʳ mars 2024.

La première fois qu’on l’a rencontrée, c’était à Cannes, il y a deux ou trois ans. Ana Girardot commençait la promotion de la série Totems, et l’on sentait qu’elle avait un peu de mal à défendre son rôle de « femme du héros », dont elle disait qu’il serait sans doute le dernier. En nous revoyant dans ce café très animé du Marais, où elle nous a donné rendez-vous, elle se remémore immédiatement l’épisode. Sauf que, depuis, la trentenaire a fait un bout de chemin. Marie Kinsky, « la rousse réac qui gueule sur tout le monde et sent un peu le cul », qu’elle interprète dans la série La Fièvre, actuellement sur Canal+, n’est, elle, la femme de personne. Et l’on sent, au fil de la conversation, que le temps d’attendre les rôles qui la sortiront des archétypes auxquels ses traits fins l’ont longtemps destinée est révolu.

Devant un expresso, la brindille au carré blond et au tutoiement facile confirme. « Marie m’a d’abord fait peur, mais mon agent m’a fait remarquer qu’elle était ce que je demandais depuis des années : un personnage qui me détache de la femme douce et attendrissante. Le talent d’Eric [Benzekri, le créateur de La Fièvre], ajoute-t-elle, est d’écrire des rôles de femmes qui ne sont pas en pleine tourmente amoureuse, qui vont sur un terrain généralement réservé aux hommes et qui sont brillantes. Marie est une femme intelligente, mais, surtout, elle a une morale à l’opposé de la mienne. » Pour achever de se convaincre, elle a repensé à la politicienne populiste incarnée par Emma Thompson dans la série Years and Years et a fait confiance au regard de Ziad Doueiri, réalisateur attitré d’Eric Benzekri. « Il m’a dit “be a bitch” [“sois une garce”], et j’ai adoré être une connasse ! »

Par ses origines familiales, la morale d’Ana Girardot s’ancre plutôt à gauche, voire très à gauche du côté maternel, puisque son arrière-grand-père, communiste, a fui l’Espagne et le franquisme. Elle en garde un certain sens du devoir civique, mais pas beaucoup d’illusions. « Je vote et la politique m’intéresse, mais j’ai grandi avec les “Guignols” à la télé. Pour moi, les politiques sont des marionnettes, tout ça est une blague, un politique ne va jamais au bout de ses promesses », dit celle qui retient surtout la force du collectif de ses manifs contre le contrat première embauche et le Front national.

Des années de rôles tout en délicatesse

Avant d’en finir avec « la femme de », l’enfant de la balle a aussi dû faire un sort à la « fille de ». Son père, le comédien Hippolyte Girardot, n’est pas particulièrement heureux à l’idée que sa fille se frotte au cinéma. Sa mère, l’actrice Isabel Otero, laisse faire. Mais pas évident pour la jeune Ana de se projeter dans autre chose, alors que les saltimbanques défilent à la maison et que la pratique artistique est le seul domaine où elle obtient de bons résultats à l’école.

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