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Le futur accélérateur de particules géant du CERN : est-ce bien raisonnable ?

Le Centre européen pour la recherche nucléaire (CERN), créé en 1954 et situé à la frontière franco-suisse, est une formidable institution. Employant 2 500 personnes en provenance du monde entier et comptant vingt-trois Etats membres, il vise à mieux comprendre l’origine de la matière et les grandes lois de l’Univers. On lui doit notamment l’invention du Web dans ses locaux, en 1989.

Le boson de Higgs y a été également découvert expérimentalement en juillet 2012 grâce au Large Hadron Collider (LHC), l’actuel accélérateur de particules du centre, le plus puissant au monde. La découverte de l’infiniment petit nous renseigne toujours davantage sur la matière, et ainsi sur l’origine de l’Univers, donc de nous-mêmes. Le CERN constitue une fierté internationale et notre bien commun, et c’est pourquoi ses projets nous concernent toutes et tous, bien au-delà de ses seuls scientifiques.

Ces dernières semaines, le CERN se fait surtout connaître pour son projet de futur collisionneur, le Future Circular Collider (FCC). Celui-ci permettrait de disposer d’une énergie près de dix fois plus importante que celle du LHC, constituant ainsi un extraordinaire « microscope » afin de sonder le cœur de la matière. Son intérêt scientifique peut donc apparaître incontestable et il ne s’agit pas de le remettre en question.

Simplement, d’un point de vue éthique et démocratique, le projet du FCC doit toutes et tous nous interpeller. Est-ce bien raisonnable d’envisager actuellement ce qui serait le plus grand chantier d’Europe et sans doute du monde, un immense tunnel de 92 kilomètres de circonférence qui passerait sous Genève et les départements de l’Ain et de la Haute-Savoie, enfoui à 240 mètres sous terre, et dont le diamètre de forage atteindrait 6,5 mètres, avec des travaux qui s’étaleraient sur une dizaine d’années, des déplacements quotidiens de centaines de poids lourds et des déblais équivalents à deux années de déchets de BTP de Haute-Savoie ?

Est-ce bien raisonnable de promouvoir une installation dont les huit sites de surface – Ferney-Voltaire, Choulex (Suisse), Nangy, Eteaux, Charvonnex, Cercier/Marlioz, Vulbens et Challex –, qui permettraient d’accéder à l’anneau et d’y accueillir les bâtiments techniques (sans compter leur accès routier), s’étendraient chacun en moyenne sur cinq hectares de terres encore préservées, ce alors que la France s’est fixé par la loi l’objectif de zéro artificialisation nette à l’horizon 2050 ?

Une menace existentielle

Est-ce bien raisonnable d’envisager un projet dont la consommation électrique atteindrait 4 térawattheures, le triple de celle du LHC, qui consomme déjà en électricité l’équivalent de la moitié du canton de Genève, pour une empreinte carbone globale estimée à 100 millions de tonnes de CO2, presque autant que ce qu’émet l’ensemble de la Suisse chaque année (112 millions de tonnes en 2021), ce alors que les politiques publiques genevoises actuelles visent la sobriété carbone ? Sans compter son impact sur la ressource en eau, la quantité d’électricité nécessaire à un tel projet laissant entrevoir des besoins hydriques considérables.

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