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« Espaces sans frontières, les mers sont menacées par une fragmentation géopolitique »

Les conflits terrestres se déportent sur les mers. Les attaques des rebelles houthistes du Yémen visant des navires marchands dans le détroit de Bab Al-Mandab, au sud du canal de Suez, en écho à la guerre entre Israël et le Hamas, en sont la dernière illustration. La mer Noire est aussi devenue le théâtre du conflit entre la Russie et l’Ukraine. A cela, il faut ajouter le sabotage des deux pipelines gaziers Nord Stream de la mer Baltique en septembre 2022, voire les sanctions occidentales contre la Russie qui, en empêchant l’assurance du transport de pétrole au-delà d’un certain prix – 60 dollars (55,29 euros) le baril –, perturbent ses expéditions. « Loin d’être une série de coïncidences, ces blocus navals marquent la fin des mers comme espaces communs », selon Maxence Brischoux, chercheur au centre Thucydide de l’université Paris-Panthéon-Assas, et auteur de Géopolitique des mers (PUF, 2023).

Lire la critique (2023) | Article réservé à nos abonnés « Géopolitique des mers » : la souveraineté maritime en question

Espaces du vide et sans frontières, ayant permis l’essor de la mondialisation puisqu’elles assurent 80 % du transport de marchandises de la planète, les mers sont menacées, selon le chercheur, par une fragmentation géopolitique. Les principaux axes de transport maritime sont les premiers touchés. Leur perturbation donne une résonance internationale à des conflits locaux, à très peu de frais, même si d’autres routes, plus ou moins longues et coûteuses, peuvent être choisies.

En réaction aux attaques des rebelles houthistes dans le détroit de Bab Al-Mandab, large d’une trentaine de kilomètres seulement, alors que 12 % du trafic mondial de marchandises y transitent, les Etats-Unis ont mis sur pied en quelques semaines la formation d’une coalition militaire navale internationale pour assurer la sécurité maritime dans la région. La guerre en mer Noire a désorganisé le transport de céréales au point de menacer la sécurité alimentaire des pays du Moyen-Orient et d’Afrique, les obligeant à s’impliquer dans une solution diplomatique.

Ces attaques ont des effets démultiplicateurs et, avec la dissémination des missiles et des drones dans des petits groupes armés non étatiques, elles risquent d’être de plus en plus nombreuses. Cette logique de compartimentation est aussi à l’œuvre en ce qui concerne l’accès aux ressources, comme c’est le cas des gisements de gaz que se disputent les Grecs, les Chypriotes et les Turcs en Méditerranée orientale.

Les ambitions de la Chine

Quelles sont les zones les plus vulnérables ? « Ce sont les mers fermées, donc faciles à bloquer, où se concentre souvent l’activité humaine, et à proximité d’une zone de conflit », détaille Maxence Brischoux. C’est le cas de la mer de Chine méridionale, de la mer Baltique ou encore du golfe Persique.

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