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Comment l’onagre écoute les insectes voler

L’onagre de Drummond (« Oenothera drummondii » ), à Marseillan (Hérault), en octobre 2014.
Retrouvez tous les épisodes de la série « Plantes de génie » ici.

Pieds nus dans les dunes, l’estivalier de Marseillan-Plage, tout proche de Sète (Hérault), peut ne pas la remarquer. Touffue ou poussant en grappes qui rasent le sable, l’onagre de Drummond – savamment appelée Oenothera drummondii – a pourtant une qualité extraordinaire que ne laisse pas deviner son apparence un brin quelconque. Cette fleur jaune peut en effet détecter à distance ses principaux pollinisateurs. Plus précisément, ses pétales vibrent au son des ailes des abeilles. En réaction, la fleur produit un nectar adouci, 20 % plus sucré. Autre prouesse, ce mécanisme d’attraction, qui accroît ses chances de reproduction, est activé en trois minutes chrono !

En France, la station balnéaire qui jouxte l’étang de Thau est le seul endroit répertorié – par l’Inventaire national du patrimoine naturel (INPN) – où l’Oenothera drummondii pousse de façon sauvage. « La fleur a dû s’échapper d’un jardin », explique Guillaume Fried, botaniste et chercheur à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), qui analyse sur le territoire les risques de développement des plantes exogènes. « En France, elle est naturalisée, c’est-à-dire qu’elle se maintient depuis quelques années sans proliférer. On peut donc encore l’acheter pour un usage privatif. Par contre, dans le sud de l’Espagne, elle est déjà considérée comme invasive », précise le chercheur.

Originaire du Texas, où le botaniste écossais Thomas Drummond l’a découverte en 1833, cette onagre est « un envahisseur efficace qui a colonisé de nombreux systèmes dunaires dans le monde entier au cours du dernier siècle », précisent des universitaires espagnols et mexicains dans une étude publiée en novembre 2019. La mappemonde proposée par l’INPN permet de visualiser les plausibles voyages de ses graines au gré des vents et de la mondialisation. Traversant mers et océans, la plante s’est introduite de façon pointilliste au Pays de Galles, en Suède, au Pérou, en Chine, en Afrique du Sud, en Egypte, en Australie et encore… en Israël.

Basses fréquences

Dans ce dernier pays, l’onagre, qui fleurit à foison sur les plages, inspire particulièrement les chercheurs. En 1986, des travaux, menés par le professeur en botanique Dan Eisikowitch, de l’université de Tel-Aviv, ont permis de comprendre que la fleur avait la capacité de faire savoir, par la forme et la couleur de ses pétales, si elle avait déjà été vidée de son pollen. L’équipe a ainsi mis au jour la manière dont l’onagre aiguillait les pollinisateurs « pour qu’ils économisent de l’énergie, trouvent les bonnes fleurs et ne quittent pas la zone sans l’avoir totalement exploitée », écrit-elle dans le Botanical Journal of the Linnean Society.

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