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Au Rassemblement national, le goût d’une « victoire idéologique » sans réflexion de fond

La présidente du groupe Rassemblement national, Marine Le Pen (au centre), à l’Assemblée nationale, à Paris, le 12 décembre 2023.

Un petit bureau de l’Assemblée nationale est resté éclairé, dans la nuit du 18 au 19 décembre 2023. Loin du calme retrouvé au Palais-Bourbon, après les tensions de la première journée de commission mixte paritaire sur la loi « immigration », Yoann Gillet et Edwige Diaz sont euphoriques. Les deux députés – du Gard et de la Gironde –, référents du Rassemblement national (RN) sur ce projet de loi, appellent leur président, Jordan Bardella.

Devant eux, un tableau figurant les propositions du parti d’extrême droite : fin de l’automaticité du droit du sol, extension de la déchéance de nationalité, rétablissement du délit de séjour irrégulier et, surtout, « préférence nationale » appliquée aux aides sociales. Toutes ou presque accompagnées d’une croix verte. « On n’arrivait pas à y croire, ce sont des propositions qu’ils qualifiaient quasiment d’antirépublicaines… », s’étonne encore Edwige Diaz.

Jamais le RN ne s’est autant targué de la popularité de ses idées, accusant ses adversaires de braconner des promesses et fantasmes que Jean-Marie Le Pen, l’ancien leader du mouvement, et les siens ont longtemps été seuls à agiter. Un paradoxe, tant le parti ne produit toujours aucune matière idéologique ni programmatique.

Lors de ses premiers vœux à la presse dans le costume de président du RN, en janvier 2023, Jordan Bardella avait promis une « année studieuse » : « Le Rassemblement national entend être incontournable (…) sur le terrain des idées et celui des territoires. » Deux mois plus tard, l’eurodéputé lançait son « école des cadres » et un site Internet de formation interne, pour « occuper plus que jamais l’espace de la bataille culturelle, de la bataille métapolitique ».

« On est un parti d’action »

Preuve de son « obsession de faire encore monter en gamme » le parti « sur le terrain des idées », Jordan Bardella annonçait six « grands colloques » d’ici à la fin de l’année – sur le « wokisme », l’intelligence artificielle, l’immigration, la souveraineté alimentaire, la santé et l’écologie. Seuls les deux premiers ont été organisés, puis déclinés dans des brochures publiées par la Fondation identité et démocratie, associée au groupe du même nom dominé par le RN au Parlement européen.

La réflexion n’est pas plus fertile à l’Assemblée nationale, où le groupe de 88 députés devait incarner la montée en compétence du mouvement. Le temps et les ressources sont davantage occupés à l’élaboration de coups tactiques ou à la transcription législative du programme de 2022 qu’à l’élaboration de la doctrine. Plusieurs groupes de travail ont été mis sur pied, mais aucun n’a donné lieu à la présentation de mesures, ni à l’ébauche de la moindre vision.

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