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Christel Bories, PDG d’Eramet : « Ne rêvons pas, l’Europe n’a pas de vastes ressources minières »

Christel Bories, PDG du groupe minier et métallurgique Eramet, à Paris, le 5 mai 2021.

Le groupe minier et métallurgique Eramet, dirigé depuis 2017 par Christel Bories, est le premier acteur français dans la compétition mondiale pour les métaux. Très présent dans la filière nickel de Nouvelle-Calédonie, il exploite aussi ce minerai en Indonésie, du manganèse au Gabon et des sables minéralisés au Sénégal. Il doit inaugurer, le 3 juillet en Argentine, un des plus gros sites mondiaux de production de lithium.

La filière du nickel néo-calédonien, dans une situation critique avant la crise actuelle, peut-elle se redresser ?

La situation est très critique et mes pensées vont d’abord à nos collaborateurs qui traversent, comme de nombreux Calédoniens, des moments particulièrement difficiles. Le secteur est face à deux problèmes structurels très compliqués à surmonter, et qui dépassent les industriels, comme la Société Le Nickel [SLN, détenue à 56 % par Eramet] : un prix de l’électricité extrêmement élevé – environ 200 dollars [soit 185 euros] le mégawattheure – pour notre industrie électro-intensive, soit trois fois plus qu’en Indonésie ; la difficulté d’avoir un accès libre à la ressource en minerai alimentant nos usines pour des raisons politiques, sociales et sociétales, même quand on a tous les permis. Ces deux sujets doivent être traités dans le cadre du « pacte nickel » proposé par le gouvernement français, qui n’a pas été signé. Il bute sur des blocages politiques et sociétaux.

Et l’exportation de minerai brut est un troisième problème…

C’est effectivement le troisième sujet. Tous les minerais extraits ne sont pas adaptés à nos usines. Nous avons obtenu du gouvernement calédonien le droit d’exporter 4 millions, puis 6 millions de tonnes par an ; Eramet n’a jamais pu dépasser 3 millions et sera en dessous de 2 millions en 2024, notamment parce que sur les mines destinées à l’export [situées dans la province du Nord, dirigée par les indépendantistes], nous avons des difficultés à obtenir les permis d’exploiter.

Le gouvernement calédonien sait malheureusement tout cela. Eramet, qui ne réalise plus qu’une faible part de son chiffre d’affaires en Nouvelle-Calédonie, ne peut pas financer une société qui n’a pas de perspective de retour à la rentabilité. Sinon, je ne respecterais pas l’intérêt social du groupe et mes actionnaires seraient en droit de me poursuivre. C’est aujourd’hui l’Etat français qui met de l’argent pour que la SLN poursuive son activité.

Dans l’immédiat, elle doit maintenir les fours chauds, et ses salariés se sont mobilisés volontairement, de façon remarquable, pour sauver leur outil de travail. Aujourd’hui, les équipes de la SLN sont à pied d’œuvre pour faire tourner l’usine, malgré les difficultés d’approvisionnement de minerai. L’avenir du nickel calédonien est un sujet très complexe.

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