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Au Kazakhstan, la peur des déserteurs d’être renvoyés en Russie

A Astana, il vit sans carte SIM, ni logement ou compte bancaire à son nom. Oleg (le prénom a été modifié pour des raisons de sécurité), la trentaine, est né à l’intérieur du cercle polaire russe, « dans une ville où les températures descendent entre − 50 °C et − 60 °C l’hiver ». Cet ex-militaire russe réside dans la capitale du Kazakhstan, depuis qu’il a déserté l’armée, fin 2022.

Des Russes ayant fui leur pays font la queue pour s’enregistrer dans un centre de services publics,  à Oral, au Kazakhstan, le 28 septembre 2022.

« Je viens d’une famille pauvre, où l’armée est souvent la seule voie pour survivre. Dès le début de la guerre en Ukraine, j’ai été affecté dans les zones de combat les plus chaudes. C’était n’importe quoi, se souvient-il. J’ai tenté de démissionner maintes fois, en vain. Je ne comprenais pas à quoi servait cette guerre. Au bout de six mois, j’ai profité d’une permission pour rentrer chez moi, et j’ai traversé la frontière vers le Kazakhstan en une journée. »

Accord d’entraide judiciaire avec Moscou

Comme Oleg, plus d’une quinzaine de militaires vivraient dans ce pays d’Asie centrale pour échapper à l’enfer de la guerre en Ukraine, estime le Bureau international du Kazakhstan pour les droits de l’homme au (BIKDH), une ONG indépendante qui n’exclut pas que ces soldats pourraient être, en réalité, plus nombreux. L’ex-république soviétique, qui a vu débarquer 400 000 Russes en 2022 après la mobilisation partielle, est rapidement devenue une destination privilégiée pour déserteurs et opposants : dans ce pays russophone, où le coût de la vie est abordable, pas besoin de passeport, que les militaires russes possèdent rarement, pour entrer.

Mais la frontière franchie avec cet Etat voisin de la Russie n’est plus gage de sécurité. Le Kazakhstan est tributaire d’un accord d’entraide judiciaire passé avec la Russie, permettant la détention de toute personne recherchée par Moscou ayant commis un crime – déserteurs de l’armée compris, en vertu de l’article 338 du code pénal russe. Depuis deux ans, cinq arrestations ont déjà eu lieu, obligeant ces derniers à se faire discrets – voire invisibles –, à privilégier les emplois clandestins journaliers et à renoncer à utiliser leur carte bancaire. A ce jour, aucun d’entre eux n’a cependant été extradé par les autorités kazakhes, car « le crime de désertion ne figure pas dans le code pénal kazakh comme motif raisonnable pour extrader une personne », affirme Denis Djivaga, avocat au BIKDH. Oleg reste néanmoins sur ses gardes. Il se dit même « plus tendu que d’habitude » ces derniers temps, depuis l’arrestation de Kamil Kasimov, le 23 avril.

« Enlevé illégalement »

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