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Le changement climatique augmente la fréquence et l’intensité des turbulences en avion

L’intérieur du vol SQ321 de Singapore Airlines après un atterrissage en urgence à l’aéroport international Suvarnabhumi de Bangkok, le 21 mai 2024.

Une expérience terrifiante et mortelle. Le 21 mai, un Britannique de 73 ans a perdu la vie et une centaine de personnes ont été blessées lors d’un vol de la compagnie Singapore Airlines reliant Londres à Singapour. En cause : des turbulences majeures, qui ont fait plonger l’appareil de 1 800 mètres en quelques minutes, poussant le Boeing 777 à atterrir en urgence à Bangkok. Dimanche, douze personnes ont également été légèrement blessées dans un avion qui reliait Doha à Dublin, en raison de turbulences au-dessus de la Turquie. Les deux événements, pour lesquels des enquêtes sont en cours, ont relancé les interrogations autour de l’impact du changement climatique dans ces phénomènes météorologiques instables.

Les turbulences sont des mouvements de l’air, brusques et irréguliers, qui se produisent le plus souvent dans trois situations : au cours d’orages et de tempêtes ; au-dessus des montagnes ; dans un ciel sans nuages, ce que l’on appelle « en air clair ». Les deux premiers types sont facilement détectés par les pilotes, à l’œil nu et grâce aux radars. A l’inverse, les dernières sont considérées comme les plus dangereuses, car elles s’avèrent invisibles et surviennent donc de manière inattendue.

Ces turbulences en air clair sont entraînées par des phénomènes de cisaillement vertical du vent, lorsque deux masses d’air se superposent et se déplacent avec des vitesses ou dans des directions différentes. « Un avion porté vers le haut sur une distance peut ainsi ne plus être soutenu un peu plus loin, et donc tomber de quelques dizaines de mètres », explique Nicolas Bellouin, modélisateur climatique à l’université de Reading (Royaume-Uni) et chercheur à la chaire aviation et climat de Sorbonne Université. Les cisaillements se produisent le plus souvent à proximité des courants-jets (jet-streams en anglais), de puissants courants d’air qui se déplacent autour du globe à une altitude de 8 kilomètres à 12 kilomètres, là où volent les avions.

Hausse des turbulences modérées et sévères

C’est pourquoi la plupart des vols connaissent des turbulences, qu’elles soient légères, modérées, sévères ou extrêmes, un degré d’intensité défini en fonction de la vitesse verticale du vent. Il n’est pas possible à ce stade de déterminer quels types de turbulences a rencontrés le Boeing de la Singapore Airlines. « Il y avait des orages assez violents non loin, mais les conditions étaient également favorables pour des turbulences en air clair », indique Nicolas Bellouin.

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Quelle que soit la cause de cet accident, le changement climatique – lié à la combustion d’énergies fossiles et donc, en partie, à l’aviation – va aggraver ce genre de situations. Les turbulences en air clair sont d’ores et déjà devenues plus fréquentes au cours des quarante dernières années, selon une étude britannique de référence, publiée en juin 2023 dans la revue Geophysical Research Letters. Les plus sévères d’entre elles se sont accrues de 55 % au-dessus de l’Atlantique Nord, passant de 17,7 heures par an en 1979 à 27,4 heures en 2020. Il s’agit de l’une des routes aériennes les plus fréquentées au monde, avec près de 2 000 vols par jour entre l’Europe et l’Amérique du Nord. Les turbulences modérées ont quant à elles augmenté de 37 % (pour atteindre 96 heures par an), et les légères de 17 % (547 heures). Les résultats de l’étude montrent des hausses similaires au-dessus des Etats-Unis.

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