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Calcul quantique : l’inévitable besoin de corriger les erreurs

Un processeur quantique à base de matériau supraconducteur de la société Alice & Bob.

C’est le sujet chaud du moment en calcul quantique : la correction d’erreurs. Evidemment, on ne parle pas là de la qualité du résultat final, qu’on espère correct. Le concept désigne plutôt ce qu’il se passe pendant le calcul et recouvre l’ensemble des techniques mises en œuvre pour protéger les opérations. Car un peu comme nos oreilles ont du mal à suivre une conversation dans un environnement bruyant, les pièces maîtresses d’un ordinateur quantique, les qubits, sont très sensibles et peuvent ne pas fonctionner correctement. Ces objets, qu’on peut voir comme de petites aiguilles qu’il s’agit de faire tourner dans les bonnes directions, ont le mauvais goût de pouvoir tourner toutes seules et donc de faire perdre le fil à l’algorithme qui les utilise.

En communication, pour éviter les erreurs dans des câbles et des fibres inévitablement perturbés, les bits d’information sont redondants, répétés par exemple trois fois. Comme il est peu probable qu’un défaut touche deux ou trois bits en même temps, la transmission est garantie. Dans un PC, ces précautions sont en général inutiles, car les transistors sont fiables, avec une erreur tous les milliards de milliards d’opérations. Certains processeurs sont néanmoins dotés de protections lorsqu’ils servent à des applications critiques, dans le spatial ou la défense.

Mais en quantique, actuellement, les technologies boguent toutes les cent opérations ou, au mieux, toutes les mille. Beaucoup trop pour faire tourner des algorithmes requérant des milliards d’opérations. La correction est indispensable. L’un des chercheurs les plus connus du domaine, pour avoir proposé en 1995 l’algorithme cassant les codes secrets, l’Américain Peter Shor, a, la même année, publié un code correcteur, fondé sur de la redondance. A la fin des années 1990, deux chercheurs Russes, Alexeï Kitaev et Sergey Bravyi, proposent mieux, avec la méthode qui allait s’imposer : le code correcteur de surface. La technique « teste » des groupes de quatre qubits voisins d’un qubit à protéger et permet de savoir où est l’erreur pour la corriger, en remettant l’« aiguille » d’aplomb.

Codes de surface

« Pendant vingt ans, il n’y a guère eu de progrès. Depuis trois-quatre ans, c’est à la mode, et il y a maintenant beaucoup de résultats », constate Anthony Leverrier, chercheur à l’Inria à Paris et responsable d’une partie consacrée à ces questions dans l’un des programmes et équipements prioritaires de recherche (PEPR), lequel est doté de 150 millions d’euros.

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A la fin de 2021, deux autres Russes de l’université de Moscou, Pavel Panteleev et Gleb Kalachev, proposent une nouvelle approche, qui « teste » des qubits plus éloignés de celui à protéger. Alors que les codes de surface garantissent de pouvoir corriger la racine carrée du nombre de qubits, ces chercheurs augmentent ce nombre jusqu’à une valeur proportionnelle à N, presque aussi bien que dans les télécommunications. En février 2022, Anthony Leverrier et Gilles Zémor, chercheur à l’Institut de mathématiques de Bordeaux, font aussi bien avec une autre famille de codes. Quelques mois plus tard, ils trouvent aussi une technique pour accélérer une des étapes de la correction, le décodage, pour leur code et celui des Russes. En effet, pour repérer une erreur, un grand nombre d’opérations est effectué, qui donne une série de chiffres qu’il faut traiter pour savoir où et quoi corriger. Cela prend du temps.

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