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Les garçons et la séduction : les codes ont-ils évolué ?

« Sans titre », 2005. Cliché tiré de la série « Un été », que la photographe Marion Poussier a consacrée à l’adolescence et réalisée dans des colonies de vacances en France.

Dans les séries américaines, les adolescents connaissent leurs premiers émois amoureux à la plage, entre batailles d’eau et courses-poursuites sur le sable. A Paris, c’est à la patinoire qu’ils se retrouvent pour tenter de faire des rencontres. Rachid (certains témoins ont requis l’anonymat), 17 ans, joues rondes et pull à l’effigie de Naruto, le héros de manga, a donné rendez-vous à ses amis de lycée dans le 19e arrondissement parisien. Des écouteurs blancs vissés aux oreilles, ils chaussent leurs patins, se bousculent les uns les autres, repèrent les filles de leur âge qui font des tours de piste – et se lancent même dans un tournoi de « pierre-feuille-ciseaux » pour déterminer qui aura comme gage d’aborder celle qui porte un sweat bleu et une queue-de-cheval. Quand ils parlent entre eux de leur relation au sexe opposé, les garçons de la bande, tous hétéros et célibataires, feignent une certaine assurance et ponctuent leurs phrases d’un vocabulaire franchement réducteur. Il y a « celles sur qui tout le monde est passé », « les ex des potes » dans lesquelles « on ne tape pas ».

Quand on en discute en tête-à-tête avec Rachid, d’autres questionnements apparaissent. « C’est compliqué de plaire aux filles, de savoir ce qu’elles aiment, ce n’est jamais la même chose. Il y en a qui trouvent ça ridicule de montrer ses sentiments, d’autres qui aiment bien parce que ça permet de créer une intimité… », tâtonne le lycéen aux longs cils et aux boucles décolorées. Avec ses parents, Rachid n’a presque jamais parlé de vie sexuelle et affective : « Ma mère est assez pudique, elle m’a simplement dit : “Fais gaffe, n’aie pas d’enfants trop jeune” », rapporte-t-il.

Comme la plupart de ses amis, l’adolescent a acquis quelques notions liées au consentement lors de sessions d’information au lycée et dans le centre social qu’il fréquente après les cours. « C’est la base, je pars du principe que si la personne n’a pas dit clairement qu’elle était d’accord, il ne se passera rien », assure Rachid. « Pour moi, il ne faut pas se montrer trop frontal. Quand je trouve une fille jolie, j’essaie d’abord de rigoler avec elle, je lui fais des compliments sur ses vêtements… Je tente d’analyser ses regards, je me demande si elle me voit comme je la vois », décrit-il.

Lire l’enquête (2021) | Article réservé à nos abonnés Les séries télévisées, lucarne d’émancipation sexuelle pour les jeunes adultes

Comment le rapport à la séduction a-t-il évolué après #metoo chez les adolescents ? Dans les cours de lycée, les injonctions à la virilité ont-elles vraiment été bousculées, comme pourraient le suggérer les représentations très queer de séries comme Sex Education (Netflix, 2019-2023) et Euphoria (HBO, depuis 2019) ? Le sixième rapport sur l’état des lieux du sexisme en France, publié au mois de janvier par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, en fait encore une fois le constat : les idées machistes continuent à progresser chez les jeunes hommes. Ainsi, 40 % des répondants de 25 à 34 ans estiment qu’il ne faut pas montrer ses émotions pour être respecté en tant qu’homme, et 23 % d’entre eux reconnaissent avoir été l’auteur d’au moins une situation de non-consentement.

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