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Face à la noirceur de l’époque, le Cinéma du réel fait la part belle aux œuvres poétiques

« Voyage à Gaza », de Piero Usberti.

Curieux printemps qui s’ouvre avec la 46e édition du Cinéma du réel, au Centre Pompidou, à Paris, du 22 au 31 mars : la fonction du documentaire et son injonction au « réel » ne nous ont jamais autant questionnés, tant l’actualité s’est encore assombrie avec la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza, en représailles aux attaques du Hamas, le 7 octobre 2023. Sans parler du conflit qui s’enlise en Ukraine, de la montée de l’extrême droite à la veille des élections européennes de juin, etc. Autant de questions angoissantes qui se nichent dans les œuvres sélectionnées.

De quelle manière la noirceur s’inscrit-elle dans les films, ou comment programmer en 2024 ? L’équipe du « Réel », pilotée par la directrice artistique Catherine Bizern, a trouvé l’une des plus belles réponses qui soient : à elle seule, la compétition mêlant courts et longs-métrages redessine un autre monde, en suivant des trajectoires inédites, comme celle de Derrick Johnson, quadragénaire quittant les Etats-Unis (pour Cuba !) sous la caméra de Marie-Pierre Brêtas, dans le très attachant Leaving Amerika, et racontant, au volant, sa difficulté à « grandir » en tant qu’homme noir, depuis son enfance. « Les cinéastes qui ont les deux pieds dans le réel sont très perméables à cette atmosphère chaotique que nous vivons, explique Catherine Bizern. Les films sélectionnés regardent le contemporain en face, tout en nous emportant par la grâce de leur mise en scène. Au-delà de leur pensée, ils procurent une émotion politique. »

Désir de résister

Chacun à leur manière, les films de la compétition expriment un désir de résister. Commençons par l’inattendu et vibrant Voyage à Gaza, premier long-métrage du Franco-Italien Piero Usberti, tourné en 2018, dont le montage s’est achevé fin septembre 2023. Rétrospectivement, ce portrait de l’enclave palestinienne donne à voir la ville comme on ne la verra plus, et capte la parole d’une jeunesse désireuse de vivre, en dépit de la double chape de plomb de l’occupation israélienne et du gouvernement du Hamas, lequel, entre autres choses, bannit les relations hors mariage – le film sera projeté le 23 mars, en présence du cinéaste, qui a raconté au Monde cet éprouvant et enivrant tournage.

Des échos indirects de la guerre en Ukraine parviennent aussi avec le retour en compétition de Virgil Vernier. Le réalisateur, qui a le don d’exfiltrer le réel dans l’univers du conte, avec ses portraits de diverses jeunesses (dorées ou désargentées) dans Orléans (2012), Les Mercuriales (2014), Sophia-Antipolis (2018), ou encore Sapphire Crystal (2019), présente un « long »-métrage, Imperial Princess, que nous n’avons pu visionner. Loin du front, il suit le quotidien d’une jeune fille russe vivant seule à Monaco, et qui se sent menacée, après le départ de ses parents repartis vivre en Russie.

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