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Sur l’international, la délicate présidentialisation de Marine Le Pen

Depuis longtemps déjà, Marine Le Pen se projette. Elle a pris les mesures du bureau de l’Elysée et du poste de commandement Jupiter, ce bunker d’où la cheffe de file de l’extrême droite s’imagine gérer la dissuasion nucléaire, dont elle souhaite ancrer dans la Constitution la souveraineté exclusive de la France. La maîtrise des questions diplomatiques occupe, dit-elle au Monde, une « place importante » dans la construction de son image politique, bien qu’« il [soit] par définition plus compliqué d’apparaître et de marquer des points sur l’international tant que l’on n’a pas été au pouvoir ».

Dans sa répartition des rôles avec Jordan Bardella, le sujet lui appartient le plus souvent, comme les relations avec des dirigeants étrangers. C’est même ce qui la distingue principalement du jeune président du Rassemblement national (RN), fort d’un soutien populaire et de l’onction militante depuis son élection à la tête du parti, le 5 novembre 2022.

Hélas pour la triple candidate à l’élection présidentielle, la matière internationale est instable et, pour elle, infructueuse. Le « Frexit », en 2017, la relation à la Russie, en 2022, ont créé les conditions de ses échecs. Elle a successivement salué les victoires électorales des brexiters, de Donald Trump ou de Jair Bolsonaro, et longtemps milité pour une alliance stratégique avec la Russie de Vladimir Poutine. Autant de paris faits sur des dirigeants ayant ajouté au désordre du monde.

Alliés embarrassants

Marine Le Pen n’a pas changé de grille de lecture : « Il y a dans le monde une compétition idéologique entre les nations et les structures supranationales, que les nations sont en train de gagner », maintient-elle. Dans ce bras de fer, elle dit vouloir « parler à tout le monde, car les grandes puissances ne peuvent être niées », et rendre à la France une place qu’elle aurait perdue : une force de « pacification du monde ». Quant à son rapport aux Etats-Unis, il reste méfiant : « Ils sont notre allié, mais il faut redéfinir les conditions de cette coopération. Un allié n’est pas un ami et peut, sur certains sujets, se comporter comme un concurrent, voire un adversaire. » Dans une partie de son entourage, la thèse d’une responsabilité américaine dans l’agression russe contre l’Ukraine reste largement partagée.

Sur les questions internationales, Marine Le Pen s’appuie moins sur ses cadres que sur une poignée de conseillers extérieurs au parti, familiers des ambassades ou de l’industrie de la défense. Rien toutefois qui ne vienne contredire le cadre idéologique du parti, plus eurasiatique qu’atlantiste, observe Olivier Schmitt, professeur de relations internationales au Centre des études de guerre à l’université du Danemark du Sud : « On ne change pas aisément de vision du monde. Pour l’extrême droite française, les Etats-Unis sont l’antimodèle, corrompu et déraciné, à l’opposé d’un monde slave fantasmé, une Russie qui serait restée ethniquement et idéologiquement pure. »

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