Tant pis pour les amateurs de septième art. En Norvège, les salles obscures resteront closes jusqu’à 13 heures le dimanche, en vertu d’un règlement adopté en 1735, visant à s’assurer que rien ne viendrait troubler le jour du seigneur. Un texte dont la plupart des Norvégiens ignoraient l’existence, jusqu’à ce que le travail dominical soit débattu au Parlement et que le journal Aftenposten en retrouve la trace.
Tout a commencé par la proposition de trois députés du parti Rouge (extrême gauche), début octobre 2023. Face à l’inflation du nombre de communes revendiquant le statut de « centres touristiques », leur permettant d’autoriser l’ouverture des magasins le dimanche, les parlementaires réclament des restrictions pour que le septième jour de la semaine reste « un jour différent ». Des discussions s’engagent alors au sein de la commission des affaires familiales et de la culture.
Des députés du Parti libéral, du Parti conservateur et du Parti du progrès (nationaliste) profitent de l’occasion pour faire remarquer que la loi régulant le travail les jours fériés et le dimanche est un brin dépassée, puisqu’elle justifie le repos par la nécessité de « garantir la vie religieuse et la paix générale ».
Par ailleurs, s’il existe des exceptions pour différents types d’espaces publics, culturels ou sportifs, les cinémas, eux, n’ont pas le droit d’ouvrir avant 13 heures le dimanche, contrairement aux musées ou aux stades de football.
Les députés de droite partent en croisade
Ce détail surprend d’autant plus que personne ou presque en Norvège ne semble savoir d’où vient cette règle. Ni les cinémas, dont certains demandent régulièrement des dérogations à la police qui les leur accorde, ni les spectateurs, pas plus que les députés, jusqu’à ce qu’Aftenposten, donc, révèle l’origine de cette réglementation, « relative au sabbat », adoptée plus d’un siècle et demi avant que les frères Lumière mettent au point leur cinématographe.
Voilà les députés de droite qui partent en croisade : « La police doit-elle vraiment utiliser des ressources pour arrêter le film de Disney que les enfants regardent au cinéma le dimanche à midi ? », s’interroge Silje Hjemdal (Parti du progrès). Même le patron de l’Eglise de Norvège, Olav Fykse Tveit, reconnaît que le dispositif semble « un peu spécial et dépassé ».
Mais à gauche, pas question de céder : « Si nous ouvrons nos magasins le dimanche, cela aura rapidement des conséquences importantes pour d’autres catégories de travailleurs », réagit la députée travailliste Mona Nilsen, arguant qu’elle n’a jamais entendu parler « d’un directeur de cinéma jeté dans une cellule de détention parce qu’il avait commencé une projection un peu trop tôt ». Le 5 mars, la proposition visant à autoriser les cinémas à ouvrir avant 13 heures a été rejetée.
