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Le projet européen du Rassemblement national, un détricotage de l’UE aux contours flous

Le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, lors d’une conférence de presse sur les élections européennes de 2024, à Paris, le 29 février 2024.

Qu’importent les traités. Aux yeux de Jordan Bardella, de bons sondages valent bien des décennies de construction européenne : « Quand vous avez l’opinion et les peuples de votre côté, alors je pense que tout est possible », s’est targué la tête de liste du Rassemblement national (RN), jeudi 29 février, en dévoilant une première ébauche du projet de son parti pour les élections européennes du 9 juin. Il faut bien cette dose d’optimisme pour envisager une Union européenne (UE) au fonctionnement revu de fond en comble mais qui, sans l’assentiment de l’ensemble des Vingt-Sept pour réviser les traités, menacerait la France de sanctions économiques et politiques.

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Le président du RN a présenté sa vision d’une Union européenne réduite à des coopérations d’opportunité, sans stratégie commune ni force d’impulsion. Sa « stratégie tricolore » reprend le code couleur des feux de circulation – vert, orange, rouge –, et vise à distinguer les secteurs dans lesquels une coopération entre Etats européens est, aux yeux du RN, acceptable (Erasmus, sécurité civile, « grands projets d’avenir » ) ; admise sous condition de nouvelles restrictions (libre circulation dans l’espace Schengen « exclusivement réservée » aux ressortissants européens, marché unique conditionné à la possibilité de « favoriser nos entreprises au niveau national », agence européenne de gardes-frontières Frontex) ; ou strictement inenvisageable (défense, diplomatie, énergie, maîtrise des frontières intérieures). « Cette stratégie a vocation à clarifier le rapport que nous avons vis-à-vis des institutions européennes, a répété Jordan Bardella. Notre volonté est de tout régler sans rien détruire. »

Dans le fond, le président du RN a simplement doté d’un nuancier de couleurs le « modèle » que promeut son parti depuis qu’il a renoncé au Frexit : un projet d’« alliance européenne des nations libres et souveraines ». Une sorte d’Europe à la carte dans laquelle les Etats auraient tout le loisir de participer – ou non – à des « coopérations industrielles, économiques, scientifiques » et autres « projets d’avenir ». Un modèle si peu engageant que les Britanniques pourraient le réintégrer, selon le président du parti, qui s’était félicité du Brexit de 2020. Contrairement au programme du RN en 2019, la Commission européenne ne serait pas supprimée mais perdrait sa prérogative d’initiative législative, et serait réduite à un simple secrétariat général.

Montée en puissance des forces eurosceptiques

Le président de l’ancien Front national a beau dénier à quiconque le droit d’y voir un « Frexit caché », l’architecture institutionnelle qu’il défend revient dans les faits à détricoter et à dévitaliser l’UE. Un projet dont la mise en œuvre nécessiterait de convaincre la totalité des Vingt-Sept de mettre fin à l’actuel projet européen par la révision des textes qui en régissent le fonctionnement. « A traité constant, politique constante ; à politique différente, traité différent », confirme M. Bardella.

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