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Xavier Laqueille, addictologue : « Avec les néocannabinoïdes, on nage en pleine zone grise »

Xavier Laqueille, en 2020, à Paris.

Xavier Laqueille est médecin psychiatre et chef du service addictologie au centre psychiatrique Sainte-Anne à Paris. Il déplore que, depuis l’interdiction de l’hexahydrocannabinol (HHC), en juin 2023, des dérivés synthétiques du cannabis aux mêmes effets psychoactifs (THCPO, H4CBD, THCV) prospèrent dans un flou réglementaire. Et alerte sur les dangers pour le consommateur non averti.

Quelles sont ces nouvelles molécules vendues dans les magasins de CBD qui contournent la réglementation sur le HHC ?

Les cannabinoïdes de synthèse sont des molécules produites en laboratoire qui miment les effets du THC, principal composant psychoactif du cannabis, sur les récepteurs cérébraux, avec des résultats très variables. Le HHC, par exemple, est une molécule de synthèse, fabriquée à partir de THC hydrogéné. Depuis son interdiction en France, de nouvelles molécules apparaissent, qui sont légèrement dérivées. Autrement dit, on a simplement ajouté quelques atomes à la molécule. C’est la raison pour laquelle nous nous retrouvons avec des noms de produits différents qui ont les mêmes effets psychoactifs, vendus légalement en magasin distribuant du CBD. Et parce que le classement se fait molécule par molécule et non pas par famille de molécules, les autorités sont toujours en train de courir pour les interdire.

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Comment obtient-on ces néocannabinoïdes de synthèse ?

Certains dérivés sont 100 % synthétisés en laboratoire, d’autres sont d’origine hémisynthétique : on prend une substance naturelle présente dans le chanvre et on la modifie, comme c’était le cas avec le THC hydrogéné pour faire du HHC. Finalement, on ne fait que reproduire l’histoire des médicaments : des substances naturelles synthétisées qui imitent des effets sur les récepteurs cérébraux. A la seule exception que les néocannabinoïdes ne passent pas par le circuit licite et régulé du médicament. On nage en pleine zone grise.

Les dérivés synthétiques sont-ils plus puissants que le cannabis ?

Ce qui les caractérise, c’est justement qu’ils sont plus puissants que le THC. Le THC est une molécule qui a une longue demi-vie d’élimination – environ vingt-huit jours dans le corps –, car elle se fixe de manière importante dans les lipides et les graisses, notamment cérébrales, avec des phénomènes de relargage importants dans l’organisme. Un consommateur qui inhale du cannabis de manière régulière aura encore des traces de THC dans le corps jusqu’à un mois après la prise. Les néocannabinoïdes eux, ont une durée demi-vie d’élimination plus courte, mais des effets bien plus forts.

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