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Ministres mis en examen : la nécessité d’une règle claire

Que reste-t-il de la doctrine Bérégovoy-Balladur ? Cette pratique – injustement nommée jurisprudence puisqu’il n’y a jamais eu de décision de droit l’établissant – est née dans les années 1990 au moment du gouvernement du socialiste Pierre Bérégovoy, concernant son ministre de la ville, Bernard Tapie. Le principe est simple : tout ministre mis en cause dans une affaire judiciaire doit démissionner. Cette règle non écrite a, par la suite, été consolidée par le successeur de droite de Pierre Bérégovoy à Matignon, Edouard Balladur.

Trente ans après, l’héritage de cette doctrine serait-il devenu obsolète ? Emmanuel Macron s’était pourtant fait le chantre de la moralisation de la vie politique lors de sa première élection en 2017. Il avait d’ailleurs appliqué cette règle durant les deux premières années de son mandat. En mars 2017, en pleine campagne présidentielle percutée par l’affaire Fillon, il affirmait qu’un « ministre [devait] quitter le gouvernement lorsqu’il [était] mis en examen ». En juin 2017, son premier ministre de l’époque, Edouard Philippe, avait réitéré : « Lorsqu’un ministre est mis en examen, il convient qu’il démissionne immédiatement. » D’ailleurs, le couple exécutif d’alors avait dû rapidement mettre en pratique la règle Bérégovoy-Balladur : les ministres Richard Ferrand, François Bayrou, Marielle de Sarnez et Sylvie Goulard, mis en cause dans différentes affaires, avaient tous quitté leur poste dans les mois suivant la séquence électorale de 2017.

Mais, depuis quelques années, la tradition semble être tombée en désuétude. Eric Dupond-Moretti, ministre de la justice, est resté en poste alors même qu’il était poursuivi pour « prise illégale d’intérêts » devant la Cour de justice de la République. Olivier Dussopt, poursuivi pour favoritisme – pour des faits commis alors qu’il n’était pas ministre –, était aussi resté en poste. Et lors du dernier remaniement, Rachida Dati a été nommée ministre de la culture alors même qu’elle est mise en examen notamment pour « corruption passive » et « recel d’abus de pouvoir » dans l’affaire Carlos Ghosn.

Probité et dignité

Pour expliquer ce choix, les défenseurs du président de la République mettent en avant les récentes relaxes prononcées en faveur de plusieurs ministres ou ex-ministres, Eric Dupond-Moretti, Olivier Dussopt et François Bayrou. Pour résumer : à quoi servirait-il de démissionner comme le président du MoDem, en 2017, si c’est pour se retrouver relaxé à la fin ? Partants, Eric Dupond-Moretti et Olivier Dussopt auraient eu raison de se maintenir.

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