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L’école, miroir des rapports des classes supérieures à l’Etat

L’actualité politique récente a mis sur le devant de la scène médiatique la question des stratégies scolaires de la bourgeoisie parisienne, et, parmi celles-ci, le recours fréquent à des établissements privés prisés pour la place donnée aux souhaits d’orientation des parents, pour leur sélectivité sociale et leurs normes morales conservatrices. Cet épisode met en évidence la différence des rapports à l’école et à l’Etat selon les groupes sociaux.

Dans un récent article publié par la revue Politix, Lorenzo Barrault-Stella et Cédric Hugrée se penchent sur les rapports à l’école et aux institutions publiques des classes supérieures en croisant les données de deux enquêtes. D’abord celle, quantitative, intitulée « Pratiques et représentations face à l’Etat » (Preface), à laquelle a participé Cédric Hugrée et qui a été administrée auprès d’un panel de 2 630 personnes, représentatif de la population de France métropolitaine, afin d’analyser le rapport aux institutions publiques. Ensuite, une enquête de terrain, menée par Lorenzo Barrault-Stella, qui a, elle, consisté en un suivi répété sur plusieurs années des rapports subjectifs et pratiques aux institutions publiques de familles résidant dans le socialement très contrasté 18e arrondissement de Paris.

Le croisement des données concernant les classes supérieures de ces deux enquêtes permet de montrer à l’aide de plusieurs indicateurs (fréquence des relations avec les établissements, participation aux associations de parents d’élèves, demandes de dérogation scolaire…) que les classes supérieures ont des usages de l’école plus maîtrisés que les autres groupes sociaux, du fait de leur familiarité avec le système scolaire et universitaire, et de leurs moyens financiers. Elles ont notamment plus recours que les autres groupes sociaux à l’enseignement privé.

Deux positionnements

Les familles aisées travaillant dans le secteur public recourent sensiblement plus fréquemment à l’enseignement privé (46 %) que les familles aisées du pôle privé (40 %), mais de façon plus ponctuelle (pas toute la scolarité, pas tous les enfants). Enfin, les parents ayant eux-mêmes fait toute leur scolarité dans le privé – majoritairement de classe supérieure – sont ceux qui scolarisent le plus systématiquement leurs enfants dans le privé. Ce sont aussi ceux qui estiment le moins souvent que l’éducation nationale est une fonction importante de l’Etat.

Hormis des conflits plus fréquents avec l’administration fiscale pour les indépendants (dirigeants d’entreprise et professions libérales), l’enquête quantitative montre peu d’hétérogénéité au sein des classes supérieures quant au rapport à l’Etat. En revanche, l’enquête par entretiens et observations permet de distinguer au moins deux positionnements assez sensiblement différents.

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