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Les Serbes du Kosovo contraints de passer à l’euro

Pour la minorité serbe du nord du Kosovo qui avait gardé l’habitude de vivre à l’heure de Belgrade, la pression devient chaque jour plus forte. Depuis jeudi 1er février, les quelque 40 000 Serbes habitant dans le nord de la ville divisée de Mitrovica ont été officiellement contraints par les autorités kosovares d’abandonner l’usage du dinar serbe pour passer à l’euro, la monnaie qui a officiellement cours au Kosovo.

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Pour beaucoup de Serbes du nord de Mitrovica, cette étape est un des symboles les plus forts de l’échec des autorités de Belgrade à maintenir leur souveraineté parallèle dans ce pays dont elles ne reconnaissent toujours pas l’indépendance, proclamée en 2008. Le Kosovo est en grande partie peuplé d’Albanais, mais les Serbes représentent toujours environ 5 % de la population, surtout concentrés dans le Nord, d’où ils continuaient jusqu’à récemment de contester tous les attributs du pouvoir central kosovar.

Ce statu quo a longtemps fait du nord du Kosovo une zone de non-droit en proie aux mafias, mais il est remis en cause depuis l’arrivée au pouvoir à Pristina en 2021 d’Albin Kurti. Ce nationaliste albanais de gauche s’efforce, en effet, d’établir sa souveraineté sur le nord de Mitrovica en imposant, par exemple, depuis 2023 l’usage de plaques d’immatriculation kosovares et désormais, donc, l’euro. Même s’il ne fait pas partie de l’Union européenne, le Kosovo a adopté unilatéralement la monnaie unique depuis 2002.

Flexibilité

Cet empressement à imposer l’euro a fâché les parrains occidentaux du Kosovo, qui s’inquiètent que M. Kurti puisse déstabiliser une région qui a vécu plusieurs guerres dans les années 1990. Les Etats-Unis et l’Union européenne ont notamment appelé Pristina à reporter ce changement annoncé sans concertation. Le passage à l’euro est « non négociable », leur a répondu M. Kurti. « Nous ne voulons punir personne, mais seulement apporter la légalité et la constitutionnalité », a-t-il affirmé.

Les autorités kosovares ont toutefois annoncé vouloir faire preuve de flexibilité en « n’appliquant pas immédiatement de mesures punitives » contre les Serbes qui continueraient de commercer en dinars. « Nous prendrons le temps de les informer », a déclaré le vice-premier ministre, Besnik Bislimi. Selon des témoignages recueillis auprès de Serbes par Le Monde, la situation à Mitrovica nord n’avait de facto toujours pas changé vendredi 2 février et ils continuaient de commercer librement en dinars.

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Une bonne partie d’entre eux restent dépendants des financements venus de Belgrade, qui verserait toujours environ 120 millions d’euros par an de prestations sociales, mais aussi de salaires aux enseignants et aux personnels de santé des institutions publiques serbes parallèles maintenues en activité sur place. Ces versements sont jusqu’ici faits en dinars et sur les comptes des établissements bancaires serbes, qui ont aussi maintenu leur présence dans le nord du Kosovo.

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