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Les agriculteurs resserrent l'étau sur Paris, "plus de 100 points de blocage" en France

Les agriculteurs ont entamé, mercredi, leur troisième jour de blocage d’axes stratégiques autour de Paris. Signe qu’ils sont toujours plus proches de la capitale, des blindés de la gendarmerie ont été déployés mardi soir sur l’A6, à quelques kilomètres de Rungis. Le ministère de l’Intérieur évoque « plus de 100 points de blocage » et 10 000 manifestants dans toute la France.

Malgré les tentatives de l’exécutif de convaincre les manifestants de cesser leur mobilisation, les agriculteurs se rapprochent, mercredi 31 janvier, de Paris et du marché de gros de Rungis.

Signe de l’avancée des agriculteurs vers la capitale, des blindés de la gendarmerie ont été déployés mardi soir sur l’A6 à quelques kilomètres de Rungis, à hauteur de Chilly-Mazarin (Essonne), où sont positionnés des tracteurs de la FDSEA de Seine-et-Marne. Sans incident, selon les forces de l’ordre, même si sur certains barrages, la situation s’est quelque peu tendue en Île-de-France.

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Un convoi de 200 à 300 tracteurs parti du Sud-Ouest vers Rungis a fait étape entre Vierzon et Orléans, dans le Loir-et-Cher, pour passer la nuit de mardi à mercredi. Plus tôt, de nombreux habitants des villages traversés étaient sortis pour les saluer et applaudir leur passage, brandissant parfois des drapeaux français.


Le président de la Coordination rurale du Lot-et-Garonne, Serge Bousquet-Cassagne, a rejoint ce convoi qui prévoit d’investir le marché de Rungis, poumon alimentaire de l’Île-de-France. « Je suis très fier de vous ! Vous allez mener ce combat parce que si on ne mène pas ce combat, on est morts », a-t-il lancé aux manifestants. « Demain, il va falloir être sérieux et disciplinés », a-t-il insisté en haranguant ses troupes.

Après avoir été bloqué à plusieurs reprises par les forces de l’ordre, le convoi reste surveillé de près par les gendarmes.

Dix-huit personnes ont été interpellées pour « entrave à la circulation » mercredi matin près du marché de gros de Rungis que les agriculteurs menacent d’investir, a-t-on appris de sources policières.

Les agriculteurs continuent également leur progression vers Lyon, avec l’objectif de faire le blocus de la deuxième ville de France. En fin de journée, les tracteurs ont ainsi bloqué l’A89, qui relie Lyon à Clermont-Ferrand.

« Ils ne s’en prennent pas aux forces de l’ordre »

Il y a en France mercredi « plus de 100 points de blocage » et 10 000 manifestants, a chiffré sur France 2 le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. « Ils ne s’en prennent pas aux forces de l’ordre, ils n’entrent pas dans Rungis, ils n’entrent pas dans les aéroports parisiens, pas dans Paris. Mais si jamais ils devaient le faire, évidemment, je le répète, nous ne laisserions pas faire », a-t-il dit.

« L’objectif, c’est bien de dialoguer pour apporter un certain nombre de réponses concrètes, et ne pas se retrouver dans une situation de blocus », a renchéri le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, annonçant que le gouvernement mettait 80 millions d’euros d’aide supplémentaires sur la table pour les viticulteurs et qu’il prendrait en charge « les intérêts d’emprunt sur l’année 2024 » pour soulager la trésorerie des vignerons en difficulté.

Le gouvernement peine à convaincre

Mardi, lors de son discours de politique générale devant l’Assemblée nationale, le Premier ministre Gabriel Attal a assuré qu’il devait y « avoir une exception agricole française » et promis que le gouvernement serait « au rendez-vous, sans aucune ambiguïté » pour répondre à la crise agricole actuelle.

LE DÉBAT - Gabriel Attal, convaincant?
LE DÉBAT – Gabriel Attal, convaincant? © FRANCE 24

Malgré ces déclarations assorties de quelques nouvelles mesures, la mobilisation ne faiblit pas : mardi, les services du renseignement territorial ont recensé au niveau national près de 120 points de blocage, avec 12 000 agriculteurs mobilisés, plus de 6 000 tracteurs, même si Bruxelles a esquissé des concessions, notamment sur la question des jachères.

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Le ministre de l’Agriculture est d’ailleurs attendu mercredi après-midi à Bruxelles « pour une série d’entretiens visant à accélérer le traitement des urgences européennes », a indiqué son cabinet mardi.

Rappelant que la crise agricole ne serait pas réglée « en quelques jours », Gabriel Attal s’est dit prêt à « aller plus loin », promettant par exemple que les aides européennes de la Politique agricole commune (PAC) seraient versées « d’ici le 15 mars » et que des aides fiscales supplémentaires seraient destinées aux éleveurs.

Des déclarations qui ont laissé sceptiques les manifestants, comme Johanna Trau, céréalière et éleveuse à Ebersheim, à propos du versement en mars des aides de la PAC. « Déjà que certaines mesures mettent trois ou quatre ans à être appliquées… Là, je demande à voir ! », a-t-elle déclaré mardi dans un convoi de centaines de tracteurs bloquant l’A35, l’autoroute qui longe Strasbourg. « On veut pas forcément être bercés aux aides, on veut surtout des prix rémunérateurs », a ajouté l’agricultrice, comme en écho à la Confédération paysanne.

Le troisième syndicat agricole, classé à gauche, a appelé « à bloquer les centrales d’achat » de la grande distribution et réitéré sa demande d’interdiction d’achat des produits agricoles en dessous de leur prix de revient, à la veille d’un entretien avec le Premier ministre. La « Conf' » a critiqué sa déclaration de politique générale, estimant que celle-ci n’avait apporté « aucune perspective de long terme » au monde paysan.

Un mouvement à l’échelle européenne

Reçus mardi soir à Matignon pendant près de trois heures, la FNSEA et les Jeunes agriculteurs ne se sont pas prononcés publiquement sur les dernières paroles de l’exécutif.

Le président Emmanuel Macron, lors d’une visite d’État en Suède, s’est de son côté engagé à défendre plusieurs revendications des agriculteurs français à Bruxelles, sur l’Ukraine, les jachères et l’accord commercial avec les pays latino-américains du Mercosur.

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Le mouvement de colère s’étend en tout cas sur le continent : après des manifestations en Allemagne, en Pologne, en Roumanie, en Belgique ou en Italie ces dernières semaines, les grands syndicats agricoles espagnols ont annoncé des « mobilisations » au cours des « prochaines semaines ».


© fr24

Les associations environnementales se sont également montrées critiques, Greenpeace estimant notamment que l’exécutif « privilégie l’agro-industrie au détriment des agriculteurs et des écosystèmes dont ils dépendent ».

Avec AFP

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