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Affaire Théo : les trois policiers condamnés à des peines de 3 à 12 mois de prison avec sursis

La cour d’assises de Seine-Saint-Denis a condamné vendredi à 12 mois de prison avec sursis l’un des trois policiers à l’origine de la blessure à l’anus de Théodore Luhaka, lors d’un contrôle d’identité qui a dégénéré en 2017 à Aulnay-sous-Bois. Les deux autres gardiens de la paix jugés, Jérémie Dulin, et Tony Hochart, ont été écopé de trois mois de prison avec sursis pour « violences volontaires ».

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La justice a rendu son verdict. Trois policiers ont été condamnés à des peines allant de 3 à 12 mois de prison avec sursis, vendredi 19 janvier, par la cour d’assises de Seine-Saint-Denis, pour l’interpellation violente en 2017 de Théo Luhaka, jeune homme noir érigé en symbole des violences policières. 

Après plus de neuf heures de délibéré, le gardien de la paix Marc-Antoine Castelain, 34 ans, a été reconnu coupable du coup de matraque qui a grièvement blessé le jeune homme, alors âgé de 22 ans, dans la cité des 3 000 à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Il a été condamné à 12 mois de prison avec sursis et une interdiction d’exercer sur la voie publique pendant 5 ans. 


Des peines de 3 mois de prison avec sursis ont été prononcées à l’encontre de ses collègues Jérémie Dulin, 42 ans, et Tony Hochart, 31 ans, pour violences volontaires.

« C’est une décision d’apaisement que nous prenons comme une victoire », a réagi devant de nombreux journalistes Me Antoine Vey, avocat de la partie civile. « Cette décision vient dire une fois encore que Théo était victime ce jour-là. Que rien ne justifiait qu’il ait été battu », a-t-il notamment ajouté.

De son côté, l’avocat du principal accusé, Me Thibault de Montbrial, a accueilli le verdict comme un « immense soulagement » pour le policier. « Pour la première fois aux yeux de la France entière, il est établi le fait, comme il le dit depuis le premier jour, qu’il n’est pas un criminel », s’est-il réjoui. 

« À quand du ferme pour la police ? »

La cour a pris une décision en-deçà des réquisitions de l’avocat général, qui avait demandé des peines allant de trois mois à trois ans de prison avec sursis. Elle n’a pas retenu la qualification de « violences volontaires ayant entraîné une mutilation ou infirmité permanente ». 

À la sortie de la cour d’assises, de nombreux militants ont dénoncé « des mascarades ». « À quand du ferme pour la police ? », ont-ils scandé avec colère, tenant en main des affiches montrant les visages de personnes décédées à la suite d’interventions policières. 

« Le message envoyé à la police, c’est : ‘Vous pouvez mutiler, tuer, vous aurez du sursis' », a tancé Amal Bentounsi, fondatrice du collectif Urgence la police assassine. 


« L’infirmité permanente n’est pas reconnue », a regretté la cheffe des députés LFI Mathilde Panot, présente au tribunal judiciaire de Bobigny. « La colère est grande face au deux poids, deux mesures », a-t-elle lancé, en comparant ces peines de prison avec sursis aux condamnations à de la prison ferme infligées pour des jets de canette lors des émeutes de juin.

Incontinence et séquelles irréversibles

Théodore Luhaka, aujourd’hui âgé de 29 ans, est porteur d’une infirmité depuis son interpellation le 2 février 2017 par les trois fonctionnaires de la brigade spécialisée de terrain (BST).

La scène captée par les caméras de la ville d’Aulnay-sous-Bois montre les policiers procéder à l’arrestation du jeune homme, qui s’y oppose. Au cours de l’empoignade, Marc-Antoine Castelain porte un coup avec la pointe de son bâton télescopique de défense (BTD) à travers le caleçon de la victime.

Ce coup d’estoc provoque la rupture de son sphincter (muscle annulaire) avec une plaie de dix centimètres de profondeur. 

Malgré deux opérations chirurgicales, Théo Luhaka souffre d’incontinence et garde des séquelles irréversibles, selon les experts médicaux. Il avait confié s’être « senti violé » au cours du procès qui a duré deux semaines. Il avait confié s’être « senti violé » au cours du procès. Ses rêves de devenir « grand footballeur » s’étaient brisés.

La blessure provoquée par un coup « enseigné à l’école »

Le fonctionnaire de police avait exprimé sa « compassion » après avoir provoqué la grave blessure mais a estimé son « coup légitime », « enseigné à l’école ».

Une enquête administrative de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) avait conclu à « un usage disproportionné de la force » lors de l’interpellation. Au coup de matraque, s’ajoutent des tirs de gaz lacrymogène, des coups de genou et de poing portés par les gardiens de la paix quand Théo était menotté au sol.

Dans un rapport indépendant, le Défenseur des droits avait dénoncé « l’accumulation de manquements » dans cette affaire, préconisant une « inspection » administrative concernant les pratiques de la BST qui a fait l’objet de plusieurs plaintes. Les trois agents ont été mutés dans leurs régions d’origine. 

Avant le procès, la préfecture de police a fait savoir que « d’éventuelles sanctions disciplinaires seraient prononcées » à l’issue de la décision judiciaire. Les gardiens de la paix condamnés risquent la radiation.

Presque sept ans après cette « affaire Théo » au retentissement national, le débat sur le maintien de l’ordre et l’usage de la force n’a cessé de ressurgir avec notamment la mort de Nahel, tué lors d’un contrôle routier par un tir de police en juin 2023.

Avec AFP


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