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Croissance économique et géopolitique : « Un choc pourtant confiné sectoriellement et géographiquement peut avoir des effets globaux dévastateurs »

Guerre en Ukraine et crise énergétique, réveil mondial de l’inflation, pandémie en 2020, crise des subprimes douze ans plus tôt : ce début de XXIe siècle a été caractérisé par des événements aux conséquences planétaires, des chocs mondiaux qui affectent la plus grande part de l’économie mondiale.

On entend souvent que ces chocs sont le signe d’un monde globalisé, duquel il serait devenu impossible de s’isoler. Pourtant, ce n’est pas la première fois dans l’histoire contemporaine que de tels événements ont lieu. La grippe espagnole de 1918 a été vraisemblablement plus meurtrière que le Covid-19 ; les guerres impliquant des pays producteurs de matières premières et notamment de pétrole ont émaillé le XXe siècle ; l’inflation était presque partout galopante dans les années 1970 et 1980 ; la Grande Dépression de 1929 reste à ce jour la plus dévastatrice de l’ère moderne.

Un indice de risque géopolitique global mis au point par deux chercheurs de la Réserve fédérale des Etats-Unis propose une quantification édifiante (« Measuring geopolitical risk », Dario Caldara et Matteo Iacoviello, American Economic Review n° 112/4 avril 2022). L’indice atteint ses valeurs les plus élevées, autour de 500, pendant les deux guerres mondiales. Il valait 300 lors des attaques du 11 septembre 2001, 250 lors de l’invasion de l’Irak, en janvier 1991, 167 lors de l’invasion de l’Ukraine, en février 2022. En novembre 2023, il est à peine de 138. Il semblerait que l’incertitude géopolitique a diminué depuis la fin du XXe siècle. Penser que le monde est devenu aujourd’hui plus risqué qu’avant serait-il le résultat d’une perception sélective ?

En fait, ce ne sont pas les chocs sous-jacents qui ont changé, ce sont les mécanismes qui les transforment en phénomènes globaux. Et ce n’est pas l’intensité de la globalisation qui est en jeu, mais plutôt sa nature.

Isolation du risque

Jusque vers la fin du XXe siècle, la globalisation des échanges était fondée sur un commerce « horizontal » : on échangeait des matières premières contre des produits manufacturiers, souvent entre une ex-colonie et son ex-pouvoir colonial. Evidemment, un coup d’Etat dans un pays exportateur de cobalt ou de cuivre affectait au premier chef les importateurs de ces matières premières. Et, dans le cas du pétrole, cela concernait beaucoup d’importateurs. Mais, d’une manière générale, les conséquences restaient confinées aux secteurs qui utilisent ces matières premières de manière intensive, comme le secteur automobile pendant les chocs pétroliers des années 1970.

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