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Maladies à prions : pas de suivi rétrospectif des personnels exposés au risque de contamination

Balançant entre l’« information d’un risque et le risque de l’information », le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) vient de se pencher sur un dilemme délicat concernant les personnes ayant manipulé des prions pathogènes dans un cadre professionnel. Faut-il mettre en place un suivi de l’ensemble de ces personnels de laboratoire, et leur rappeler qu’en cas de contamination, ils courent le risque de développer la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ), affection neurologique rare mais incurable, et susceptible d’apparaître des années, voire des décennies, après l’exposition ?

C’est la question qui lui a officiellement été posée fin juin par la directrice générale de la recherche et de l’innovation du ministère de la recherche, Claire Giry. Elle lui avait été adressée antérieurement par le syndicat SUD-Recherche. Le ministère de la recherche estime entre 100 et 500 le nombre de personnes ayant travaillé sur les prions pathogènes depuis les années 1990.

Cette interrogation était motivée par les morts, en juin 2019 et en novembre 2021, de deux techniciennes de laboratoire de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). Emilie Jaumain et Pierrette Costes avaient contracté la MCJ lors de coupures accidentelles survenues alors qu’elles travaillaient sur des prions pathogènes, respectivement en 2010 à Jouy-en-Josas (Yvelines) et en 2005 à Toulouse.

Lire à ce sujet l’article principal de notre dossier sur les prions : Article réservé à nos abonnés Maladies à prions : après le décès de plusieurs chercheurs, la sécurité des laboratoires en question

Rappelons que les prions sont des protéines qui peuvent prendre des configurations aberrantes, formant des agrégats par une sorte de réaction en chaîne qui finit par détruire le système nerveux central. Cela peut survenir de façon aléatoire mais aussi lors de contaminations par des prions pathogènes d’origine humaine ou animale (comme celui responsable de la maladie de la vache folle).

Une situation anxiogène

Dans son avis, le CCNE note qu’« il existe un risque important que l’information soit source d’une angoisse disproportionnée par rapport au risque d’une part, et aux possibilités inexistantes de traitements d’autre part ». C’est la raison pour laquelle il ne recommande pas de « recherche active individuelle » de ces personnes, mais que l’information soit accessible à celles qui le demandent, ainsi qu’un accompagnement, éventuellement élargi à leur famille.

Le CCNE insiste en revanche sur le fait que dans le cas où un ancien membre du personnel développe une telle pathologie, « il est absolument essentiel qu’il puisse, d’une part, trouver des réponses facilement et, d’autre part, qu’il soit correctement pris en charge, suivi et indemnisé, sans avoir à livrer, ou que ses ayants droit aient à livrer, des batailles juridiques ». Une allusion directe à l’attitude de l’Inrae vis-à-vis d’Emilie Jaumain et de sa famille, qui a conduit cette dernière à engager des procédures – judiciaire et administrative –, toujours en cours.

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