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Denis Baranger, constitutionnaliste : « La commission mixte paritaire sur la loi “immigration” est un piège que le gouvernement s’est tendu à lui-même »

Le vote du 19 décembre sur la loi « immigration » va marquer un tournant dans le second quinquennat d’Emmanuel Macron et, plus largement, dans la vie politique nationale. Le gouvernement n’a remporté sa « victoire » à l’Assemblée nationale qu’au terme d’un processus où son texte a été récrit par Les Républicains (LR) et voté par le Rassemblement national (RN).

Illustration par excellence du « en même temps », le projet de loi du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, qui comportait un volet « progressiste » et un volet « répressif », a glissé vers un dispositif nettement plus rigoureux, susceptible d’emporter l’approbation de la droite et de l’extrême droite. Comment en sommes-nous arrivés là ?

Depuis les élections de juin 2022, nous sommes en situation de gouvernement minoritaire. C’est une réalité politique très simple et quelque peu brutale : une majorité « relative » comme celle de Renaissance n’est pas une majorité du tout. Le gouvernement ne gouverne que sous perfusion de « parlementarisme rationalisé » (49.3 et autres…) et d’hyperprésidentialisme. L’épisode de la réforme des retraites, au printemps, l’a montré sans fard.

Celui de la loi « immigration » traduit cette aggravation, mais dans une séquence où le gouvernement s’est enfermé dans une tactique institutionnelle qui l’a conduit à l’impasse.

La première faute a été de passer en force en commission des lois de l’Assemblée nationale. Alors qu’un texte largement remanié par le Sénat – et donc par le groupe LR de Bruno Retailleau – avait été accepté par le gouvernement, ce dernier a laissé sa propre majorité relative le « détricoter » dans une large mesure. Cela ne pouvait que mettre en colère les sénateurs. Du côté de l’Assemblée, cela exposait le gouvernement à la réalité de sa situation politique. Celle, donc, d’une majorité relative très fragile.

Le baiser mortel du RN

Sur un sujet générateur de tensions au sein même de Renaissance, l’immigration, ce qui devait arriver est arrivé : une motion de rejet a été votée grâce à la conjonction opportuniste de toutes les oppositions. C’est là que la seconde faute a été commise : le choix de la commission mixte paritaire (CMP) pour parvenir à l’adoption d’un texte.

La finalité d’une CMP est, en partant de deux textes votés divergents dans chacune des assemblées, de parvenir à un texte consensuel. Or, en l’espèce, seul le Sénat avait voté un texte. Le propre d’une motion de rejet est de mettre fin à toute discussion avant un vote quelconque. En CMP, seul était donc sur la table le texte sénatorial.

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