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La mort du philosophe Antonio Negri, figure intellectuelle des gauches altermondialistes

Antonio (dit « Toni ») Negri est mort le 16 décembre 2023, à Paris, à l’âge de 90 ans. Philosophe majeur du marxisme, militant communiste, figure intellectuelle célèbre et controversée des luttes sociales dans l’Italie des années 1960 et 1970, Antonio Negri fut également une référence prisée des mouvements altermondialistes des années 1990-2000. Son nom reste attaché aux années de plomb, lors desquelles s’est déployée la violence des attentats, de la répression et de la lutte armée. Son nom est étroitement lié aux succès de deux essais coécrits avec le politologue et critique américain Michael Hardt, Empire (Exils, 2000) et Multitude (La Découverte, 2004), dont l’influence fut importante pour toute une génération qui, après la chute du mur de Berlin, n’avait pas renoncé aux formes les plus radicales de l’émancipation.

Antonio Negri est né le 1er août 1933, à Padoue, dans l’Italie fasciste de Benito Mussolini, au sein d’une famille modeste de la Vénétie. Son père, de condition ouvrière, et originaire de Bologne, est l’un des fondateurs du Parti communiste italien, lors du congrès de Livourne (1921). Pourchassé par les fascistes, il meurt en 1936. Sa mère est une institutrice qui, après la mort de son mari, s’occupera seule de ses trois enfants. Après avoir fréquenté la section padouane du Parti socialiste, dont il s’éloigne vite, Antonio Negri se convertit au communisme en 1954-1955, lors d’un séjour dans un kibboutz en Israël.

L’année 1956 est la matrice de ses engagements politiques. A l’époque de l’insurrection de Budapest, la gauche de la gauche italienne rompt avec l’orthodoxie du Parti communiste, malgré son ouverture et son rôle joué dans la Résistance, mais aussi avec le marxisme de son fondateur, Antonio Gramsci (1891-1937). Cette mouvance révolutionnaire se rassemble au sein des Quaderni rossi (« cahiers rouges »), revue dans laquelle Antonio Negri entre en 1961. Comme des « ânes du désert » qui cherchent leur chemin dans les sables ou des « sociologues aux pieds nus », disait-il, lui et ses camarades mènent des combats à l’aide d’enquêtes ouvrières et de discussions passionnées avec les prolétaires.

Lire aussi notre archive (2007) : Article réservé à nos abonnés Antonio Negri : « Nous sommes déjà des hommes nouveaux »

A Turin et Milan, Antonio Negri et ses camarades luttent contre les syndicats et le parti ; à Venise, où il habite à cette époque, ils aident les travailleurs à construire leur propre organisation. « Venise, disait-il, c’est à la fois l’eau du ventre maternel et l’absolu de l’artifice : une ville façonnée par les hommes pour pouvoir vivre ensemble, pour pouvoir construire une communauté, un univers parfait. »

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