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Le Sénégal se prépare à recevoir son premier nanosatellite

La précieuse petite boîte noire de dix centimètres d’arête est prête pour le grand voyage. Gaindesat, le premier nanosatellite conçu et fabriqué par des ingénieurs sénégalais, en partenariat avec le Centre spatial universitaire de Montpellier (CSUM), doit être officiellement réceptionné par l’Etat du Sénégal le 15 décembre. Son lancement par SpaceX, l’entreprise américaine d’Elon Musk, est prévu au cours du premier semestre 2024 depuis la Floride.

Une fois mis en orbite, le satellite miniature aura deux missions. D’abord, collecter des données pour des agences étatiques comme la Direction de la gestion et de la planification des ressources en eau (DGPRE), l’Agence nationale de l’aviation civile et de la météorologie (Anacim) ou l’Office des lacs et des cours d’eau (OLAC).

« Ces structures ont des stations un peu partout sur le territoire sénégalais pour faire des mesures. Mais c’est compliqué et coûteux de récupérer les données, il faut même parfois se déplacer sur place pour brancher un ordinateur. Avec le satellite, on va pouvoir mieux communiquer avec les stations et partager les informations collectées », explique Ismaïla Sall, responsable technique du projet et ingénieur spatial sénégalais de 28 ans, formé à Montpellier.

L’autre mission du cube noir sera de prendre des images satellites du Sénégal à l’aide d’une caméra embarquée sur le boîtier pour collecter de la matière première en vue de futurs développements. Des données et des images qui seront prises dès que le satellite passera au-dessus du pays, c’est-à-dire environ quatre fois par jour pendant six à sept minutes.

Une aventure spatiale commencée en 2019

Le Sénégal deviendra ainsi le deuxième Etat francophone subsaharien, après Djibouti, à disposer de son propre satellite. Sur le continent, l’Egypte et l’Afrique du Sud ont été les premiers à se lancer, en 1998 et 1999, suivis plus tard par une douzaine d’autres pays. Signe que le spatial commence à prendre son envol sur le continent, l’Union africaine s’est dotée en janvier 2023 de sa propre agence spatiale (AfSA), dont le siège est au Caire. Elle a pour but de coordonner les activités spatiales à l’échelle continentale et d’élaborer un cadre réglementaire.

Pour Dakar, l’aventure spatiale a commencé en 2019 quand le ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (Mesri) a signé un premier protocole d’accord avec ArianeGroup qui s’est finalement retiré du projet à cause du Covid-19. En parallèle, Dakar s’est doté en 2023 d’une agence sénégalaise d’études spatiales, pilotée par Maram Kairé, astronome connu pour être le moteur de développement de l’astronomie dans le pays et qui a conduit plusieurs missions de la NASA au Sénégal et en Afrique.

Pour construire le satellite conçu à Montpellier, une convention a été nouée avec le CSUM pour plus d’un million d’euros financé par le ministère sénégalais de l’enseignement et de la recherche afin de former huit ingénieurs et cinq techniciens à la fabrication et à l’exploitation d’outils spatiaux. « L’objectif est qu’ils puissent à leur tour transmettre les compétences et les technologies qu’ils ont acquises en formant d’autres jeunes au Sénégal », souligne Gayane Faye, coordonnateur du projet spatial du Sénégal Sensat au ministère.

En orbite basse et d’une durée de vie de cinq ans

Le pays vient de se doter à Diamniadio, ville nouvelle à une trentaine de kilomètres de Dakar, d’un centre de contrôle au sol, qui va permettre de communiquer avec le satellite et de collecter les données récupérées par l’appareil. « Les jeunes ingénieurs sont formés de l’analyse des missions qui seront attribuées au satellite jusqu’à sa fin de vie », se réjouit Sébastien Hesse, ingénieur spatial français du CSUM qui a déjà encadré une première équipe d’étudiants de Djibouti un an plus tôt.

Laboratoire, université, industrie… Les nanosatellites, très performants et peu onéreux, ont le vent en poupe. « Une quarantaine de ces “cubsats” sont envoyés lors des lancements des gros satellites, greffés en bas de la coiffe. (…) D’autres pays africains sont intéressés par cette manière d’approcher le spatial », assure Sébastien Hesse.

Ces petits satellites d’une durée de vie d’environ cinq ans sont lancés en orbite basse, à quelque 550 kilomètres de la surface de la terre. « Au bout d’un moment, leur altitude diminue naturellement et ils peuvent donc faire une rentrée atmosphérique », décrit le jeune ingénieur Moustapha Diop, qui envisage de faire une thèse à l’étranger avant de revenir au Sénégal pour enseigner et participer au développement de cette technologie de pointe dans son pays.

Le Sénégal n’a pas prévu pour le moment de se lancer dans la fabrication d’un deuxième satellite. Mais « nous n’allons pas nous arrêter là », assure Gayane Faye, coordonnateur du Mesri. « En formant des jeunes, notre objectif est de créer un nouveau secteur d’activité alors que ce domaine embauche énormément, explique l’ingénieur, lui-même spécialisé dans l’exploitation des données satellitaires. Peut-être que cela va créer un écosystème propice à l’émergence de start-up et d’entreprises spatiales. »

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