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Quand l’Elysée dissuade une commission d’enquête parlementaire d’auditionner son conseiller sport

Cyril Mourin,  au centre, conseiller sport, Jeux olympiques et paralympiques 2024 et jeunesse de l'Élysée, à Pau, le 5 septembre 2023.

Durant leurs travaux, c’est peu dire que les membres de la commission d’enquête parlementaire sur les défaillances (violences sexuelles et sexistes, discriminations, problèmes de gouvernance et malversations) des fédérations sportives se sont heurtés à la loi du silence. Créée en juin à l’Assemblée nationale, ladite commission a mené quatre-vingt-dix auditions et doit présenter, à huis clos, mardi 19 décembre, son rapport d’enquête.

Entre mensonges, parjures, approximations, omissions volontaires et échanges musclés, les auditions ont offert l’occasion aux députés de prendre la mesure de l’omerta qui peut parfois régner dans le microcosme du sport français. S’ils ont entendu un certain nombre de protagonistes (comme la ministre des sports, Amélie Oudéa-Castéra), de présidents de fédérations ou de dirigeants déchus (comme Noël Le Graët ou Bernard Laporte), les membres de la commission n’ont pas été en mesure d’auditionner un acteur de l’ombre, et pourtant clé, du sport hexagonal, à quelques mois des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.

Selon nos informations, Cyril Mourin, conseiller sport, Jeux olympiques et paralympiques 2024 et jeunesse d’Emmanuel Macron depuis 2017, n’a pas donné, cet automne, une suite favorable aux sollicitations de la commission d’enquête, et n’a donc pas été entendu sous serment par les députés.

D’après nos sources, il a été contacté par mail par la conseillère de la commission, car la rapporteuse, Sabrina Sebaihi (Hauts-de-Seine, Europe Ecologie-Les Verts) souhaitait l’auditionner. M. Mourin a alors indiqué aux services de l’Elysée qu’il ne voyait pas l’intérêt d’être entendu sur ces thématiques. Par téléphone, le 19 octobre, le palais a ensuite dissuadé la commission d’auditionner M. Mourin, au nom de la « séparation des pouvoirs », selon Mme Sebaihi. Par ailleurs, la présidente de la commission, Béatrice Bellamy (Vendée, Horizons et apparentés), confirme que c’est bien au nom de ce principe que le conseiller élyséen n’a pas été entendu. Dans ce contexte, et en raison de cet argument juridique, Mme Sebaihi a été contrainte d’annuler la convocation de M. Mourin, qui était déjà prévue.

Or, cet argument de la séparation des pouvoirs est irrecevable sur le plan juridique, selon deux éminents professeurs de droit contactés par Le Monde. L’ordonnance no 58-1100 du 17 novembre 1958 ne mentionne que le « respect du principe de la séparation de l’autorité judiciaire et des autres pouvoirs ».

Le précédent de l’affaire Benalla

En 2018, la commission d’enquête sénatoriale chargée de faire la lumière sur l’affaire Alexandre Benalla avait considéré que « rien ne s’oppose juridiquement à ce qu’un collaborateur du chef de l’Etat soit entendu par une commission parlementaire, qu’elle soit ou non dotée de pouvoirs d’enquête ». Le secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler, et le directeur de cabinet de M. Macron, Patrick Strzoda, avaient ainsi été auditionnés.

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