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Dette : la France plus que jamais sous surveillance

Ça passe ! Une fois de plus, la France a échappé à une dégradation de sa signature en tant qu’emprunteur sur le marché de la dette publique. L’agence S&P Global Ratings a finalement choisi, vendredi 1er décembre, de maintenir la note « AA ». Un abaissement de celle-ci aurait pour conséquence un renchérissement à terme du coût de financement sur les marchés financiers, réduisant un peu plus les marges de manœuvre budgétaires du gouvernement.

L’enjeu n’est pas mince. Le pays a accumulé plus de 3 000 milliards d’euros de dettes, auxquels s’ajouteront 285 milliards d’euros en 2024. Jamais la France n’aura autant emprunté sur une seule année. Près de la moitié de son budget est désormais financée par des emprunts sur les marchés.

Le soulagement exprimé par le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, à l’annonce de la décision est compréhensible. Le maintien de la note française ne doit pas pour autant être interprété comme un blanc-seing. Comme en juin, S&P a assorti son appréciation d’une « perspective négative », laissant ouverte la possibilité d’une dégradation ultérieure. L’agence de notation pointe un déficit budgétaire qui reste élevé et une dette qui ne baisse pas suffisamment rapidement.

Une grille de lecture plutôt conciliante

La France garde toutefois le bénéfice du doute, comme en juin lorsque S&P avait déjà maintenu le « AA ». A l’époque, l’adoption de la réforme des retraites avait rassuré l’agence sur la capacité du pays à se réformer, même en l’absence de majorité parlementaire. Surtout, l’économie française faisait encore preuve d’une certaine résilience par rapport au reste de la zone euro.

Entre-temps, la conjoncture s’est dégradée. Le PIB a légèrement reculé au troisième trimestre, le taux de chômage et le nombre de défaillances d’entreprise remontent. Lors de sa dernière revue, S&P avait souligné des « risques » relatifs à l’exécution des engagements budgétaires du gouvernement. Certains commencent à se matérialiser, rendant plus hypothétique la trajectoire fixée dans le cadre de la loi de programmation budgétaire.

La décision de S&P n’avait rien d’évident. La France affiche une dette de 110 % du PIB, alors que la moyenne de celle des autres pays notés « AA » s’élève à seulement 60 %. Plus inquiétant, selon les projections du FMI jusqu’en 2028, la France ne serait pas en mesure de réduire aussi significativement que ces pays son taux d’endettement et son déficit budgétaire. Le questionnement de la crédibilité des anticipations du gouvernement par la plupart des instituts de conjoncture n’a cependant pas dissuadé l’agence de notation d’appliquer à la France une grille de lecture plutôt conciliante.

Les prochains exercices budgétaires s’annoncent pourtant périlleux. Pour 2024, des économies ont pu être trouvées, mais la plupart sont le résultat de la suppression des aides exceptionnelles liées à la lutte contre l’inflation. Ce levier conjoncturel ne pourra plus être activé sur les années suivantes. Alors que le gouvernement s’accroche à un scénario conjoncturel très optimiste, il s’est engagé à trouver 12 milliards d’économies par an jusqu’en 2027 sans donner à ce stade beaucoup de détails sur leur origine.

Tant qu’une réflexion de fond sur l’efficacité de la dépense publique n’aura pas été menée, la France ne pourra pas sortir du cercle vicieux de la dette. Entre le ralentissement de la conjoncture, des taux d’intérêt élevés et la réactivation des règles budgétaires européennes en 2024, le pays n’a pourtant plus beaucoup le choix, quelle que soit la note attribuée par S&P.

Le Monde

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