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Physique : quand l’eau joue à cache-cache

L’eau qui coule d’un robinet forme un « mur » circulaire  de quelques millimètres de hauteur.

Une équipe de l’Institut d’électronique, de microélectronique et de nanotechnologie, à Lille, a découvert un phénomène qui n’avait jamais été repéré jusqu’alors. Ni par l’œil attentif de Léonard de Vinci, au XVIᵉ siècle, ni par celui d’un maître de la mécanique des fluides, Lord Rayleigh, en 1914, qui s’étaient tous deux pourtant penchés sur le sujet.

Ce dernier est pourtant assez banal et chacun l’a déjà vu dans son évier ou dans son lavabo : le ressaut hydraulique. Ou comment, autour du jet tombant du robinet, se forme au fond du récipient un bourrelet liquide entourant une zone lisse et peu épaisse. Le « ressaut » désigne cet anneau liquide, que Léonard de Vinci avait parfaitement dessiné. La nouveauté est que cet anneau, qui persiste tant que l’eau coule, peut, dans certaines conditions, disparaître, puis réapparaître, puis disparaître de nouveau. Les spécialistes disent que le ressaut oscille.

« Nous ne sommes peut-être pas les premiers à l’avoir vu, mais personne ne l’avait publié et expliqué avant nous, en tout cas, note Alexis Duchesne, enseignant-chercheur à l’université de Lille et coauteur de la publication parue dans Physical Review Letters, le 8 novembre. « C’est génial de trouver quelque chose de nouveau dans un aussi vieux phénomène », apprécie le coauteur Michael Baudoin, professeur à l’université de Lille.

Clore une controverse

Autre plaisir, la découverte est pour ainsi dire fortuite. Les chercheurs n’étaient pas partis pour voir disparaître le fameux bourrelet liquide. Ils voulaient au contraire clore une controverse sur l’origine même du ressaut. Depuis 2018, en effet, et une proposition théorique de Rajesh Kumar Bhagat de l’université de Cambridge, des débats agitent la communauté sur les raisons de l’apparition d’un mur d’eau. Est-ce l’équivalent du passage du mur du son, avec un liquide se propageant plus vite que les vagues à sa surface, comme on le pensait avant 2018 ? Est-ce un brutal « démouillage » du liquide sous l’effet des forces de tension de surface, connues pour donner sa forme au ménisque de l’eau dans un récipient, par exemple, comme le propose le Britannique ?

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« Nous avions lancé des expériences à petite échelle, avec des jets de moins de un millimètre de diamètre, justement pour mieux saisir le rôle des tensions de surface, indique Alexis Duchesne. Mais, pour comprendre le phénomène d’oscillation, on n’a pas besoin de connaître l’origine du ressaut. »

Ils n’ont donc pas répondu à cette question, mais sont tombés sur autre chose : l’oscillation de l’anneau. C’est une histoire d’ondes. Lorsque le ressaut est « installé », il ressemble à une cavité avec le filet d’eau tombant, puis une zone interne lisse, puis un « mur d’eau », et enfin une zone liquide plus épaisse. Les ondulations qui se propagent dans cette cavité peuvent donc s’amplifier par allers-retours successifs. Ces vagues déplacent le liquide en créant des creux et des bosses. Si le débit est assez faible, ces variations d’altitude peuvent faire disparaître les quelque 4 millimètres de hauteur du mur d’eau. Et les faire réapparaître moins d’un quart de seconde plus tard.

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