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Le sentiment de déclassement des classes moyennes, une « bombe politique à retardement »

Depuis le début du deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron, toutes les attentions semblent portées sur ces fameuses « classes moyennes », difficiles à définir de manière précise, mais dont les membres seraient trop pauvres pour pouvoir vivre correctement de leur salaire, tout en étant trop riches pour bénéficier des aides de l’Etat. Une enquête de l’IFOP, commandée par la Fondation Jean Jaurès et l’agence de conseil en affaires publiques Bona fidé, donne de précieuses indications sur la situation et le ressenti de cette catégorie de la population, et sur son évolution, treize ans après une première étude réalisée en pleine crise financière. Confrontée depuis des mois à la pire inflation depuis les années 1980, comment s’en sort-elle aujourd’hui ?

Premier enseignement de cette enquête que Le Monde dévoile en exclusivité : près des deux tiers des répondants, à qui l’IFOP a demandé de se situer sur l’échelle sociale (de « défavorisés » à « aisés »), s’autopositionnent dans ce « grand bloc central » auquel Valéry Giscard d’Estaing – qui avait publié Deux Français sur trois (Flammarion, 1984) – désirait déjà s’adresser. Plus précisément, ​​78 % des CSP+, 76 % des professions intermédiaires, 68 % des retraités, mais aussi 51 % des catégories populaires se rangent spontanément dans cette catégorie.

« La classe moyenne reste une définition attractive et valorisante pour une large majorité de Français », constatent les auteurs de cette note intitulée « Classes moyennes en tension. Entre vie au rabais et aides publiques insuffisantes ».

« Un phénomène sociologique majeur »

Mais ce vaste corps central est fragilisé et traversé par un sentiment de déclassement, observent Jérôme Fourquet et Marie Gariazzo, pour l’IFOP, et Samuel Jéquier, pour Bona fidé. Par rapport à l’enquête de 2010, la proportion de Français composant la classe moyenne « inférieure » a progressé de 9 points, quand celle constituant la classe moyenne « véritable » – selon la distinction faite par l’IFOP, en fonction du revenu des sondés – régresse d’autant.

« Par-delà la stabilité de surface quant au périmètre de la classe moyenne, une frange significative de [celle-ci] est donc aspirée vers le bas, ce qui constitue un phénomène sociologique majeur », écrivent les auteurs, alors qu’au total, 70 % des Français déclarent appartenir aux catégories défavorisées et modestes ou à la classe moyenne inférieure – un pourcentage en croissance de 13 points par rapport à 2010. ​​

Fragilisés sur le plan économique, ces derniers sont contraints d’adopter des stratégies de contournement. S’ils ne s’endettent pas davantage, ils épargnent moins : en 2010, ils étaient 54 % à déclarer pouvoir épargner ; ils ne sont plus que 44 % aujourd’hui. Pour faire face aux difficultés nouvelles, ils sont, en outre, de plus en plus nombreux à s’inscrire dans une « économie de la débrouille ».

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