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Industrie : la Cour des comptes critique le plan « relocalisations » du gouvernement

Le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, à Paris, le 16 février 2022.

En 2020, la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 et ses conséquences ont été un choc pour la France. Le pays de Colbert et de Pasteur découvre, effaré, son immense dépendance industrielle aux importations étrangères, en particulier asiatiques et notamment chinoises, et sa vulnérabilité face à l’arrêt forcé des « chaînes de valeur » mondiales et des approvisionnements en biens dits « essentiels ». En septembre de cette année noire, le gouvernement décide alors de lancer un appel à projets sur les « relocalisations sectorielles », visant à soutenir des projets d’investissement d’entreprises implantées en France. Cinq secteurs sont identifiés comme stratégiques : l’agroalimentaire, la santé, l’électronique, les intrants essentiels à l’industrie et la 5G.

Conçu dans le cadre du plan de relance postcrise, ce dispositif confié à la direction générale des entreprises, au ministère de l’économie et à son opérateur Bpifrance visait à la fois à apporter des financements rapides à des projets industriels en phase de développement, mais aussi à participer à la restauration à long terme d’une partie de la souveraineté industrielle de la France, en réduisant notamment certaines de ses dépendances stratégiques.

Trois ans plus tard, alors que le gouvernement vante sa politique de réindustrialisation, la Cour des comptes a décidé de tirer un premier bilan de l’opération. Rendu public mercredi 22 novembre, ce bilan est loin d’être positif. A ce jour, 531 projets d’investissements ont été retenus à l’issue de l’appel − « majoritairement des PME » − et bénéficient d’une subvention publique pour un coût total de 838 millions d’euros. Avec des frais de gestion versés par l’Etat à Bpifrance pour un montant total de 14 millions d’euros, dont « un coût d’instruction particulièrement élevé, de l’ordre de 7 400 euros par projet », soulignent les magistrats.

« Défauts de conception notables »

Pour le rapport de la Cour des comptes, le dispositif, « conçu dans l’urgence », a « manqué de cohérence » et « souffert de défauts de conception notables ». A cause de nombreux retards, pour partie liés à la crise énergétique depuis le début de la guerre en Ukraine, seuls trente-trois des 531 projets retenus sont « totalement terminés trois ans après le lancement » de l’appel, et « il n’est donc pas possible de mesurer, en 2023, les effets du dispositif sur l’économie française, ni même sur la situation financière des bénéficiaires ».

Les magistrats regrettent surtout que le gouvernement n’ait pas été plus précis en amont dans les objectifs ciblés par son plan. « Le dispositif (…) a été conçu de manière précipitée et n’a pu aboutir à la fixation d’objectifs clairs et mesurables », écrivent-ils, présentant « des risques élevés de saupoudrage des moyens publics, voire d’effets d’aubaine ». D’autant qu’en aval « aucun indicateur de résultat convaincant n’a pu être mis en place ». Mal ciblé au départ, mal mesurable à l’arrivée, en somme.

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