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« Des premiers socialistes à nos jours, toutes les composantes de la gauche ont tenu des propos antisémites mais selon des proportions très variables »

Parmi ses multiples conséquences, l’embrasement du conflit israélo-palestinien pose dans notre pays la question de l’antisémitisme à gauche. Le refus de La France insoumise de qualifier le Hamas d’organisation terroriste nourrit le discours selon lequel la gauche française serait foncièrement antisémite. Qu’en est-il véritablement ?

Des premiers socialistes à nos jours, toutes les composantes de la gauche ont effectivement tenu des propos antisémites, mais selon des proportions très variables. Cet antisémitisme à gauche a pris cinq formes. Il commence par un antijudaïsme économique, reposant sur un antijudaïsme ancien et puissant dans la France catholique du début du XIXe siècle. L’image du juif, profiteur et usurier, acquiert une vigueur nouvelle avec l’émergence du capitalisme que des socialistes utopiques, tels que Proudhon, assimilent à « Rothschild »  ; mais Saint-Simon et Louis Blanc n’ont pas d’hostilité envers les juifs.

La deuxième forme apparaît dans les années 1880, avec l’antisémitisme moderne. Les organisations ouvrières naissantes sont infectées par la xénophobie et l’antisémitisme de l’extrême droite. Mais avec l’affaire Dreyfus, la gauche comprend, grâce à Jaurès, qu’elle doit rompre avec les antisémites. Ce tournant est capital et dès lors la gauche combattra l’antisémitisme, excepté quelques militants d’extrême gauche qui flirteront avec lui ; on retrouve un écho de cette démarche aujourd’hui.

Révisionnisme, puis négationnisme

Une troisième forme apparaît dans les années 1930. Traumatisée de n’avoir pu empêcher la Grande Guerre, ne comprenant pas la nouveauté du nazisme, une partie importante de la gauche défend un pacifisme résigné. L’extrême droite défend alors un antisémitisme massif, en particulier contre Léon Blum. De nombreux socialistes pacifistes considèrent les antifascistes comme des irresponsables parce qu’ils prônent la fermeté à l’égard d’Hitler. Ces pacifistes tiennent un discours antisémite de plus en plus décomplexé ; certains collaboreront avec Vichy.

Une quatrième forme apparaît au sein de l’ultragauche : le révisionnisme dans les années 1950 et, deux décennies plus tard, le négationnisme. Le premier minimise le génocide ; le second le nie en accusant les juifs de tirer profit de sa mémoire. Tous deux reposent sur un marxisme sommaire, le rejet de la démocratie et de l’antifascisme. Ils sont conçus par deux militants qui nouent bientôt des liens avec l’extrême droite. Limité d’abord à un tout petit cercle, le négationnisme voit ensuite son audience s’élargir.

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