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« Allô ? » : de Bayrou à Sarkozy, les politiques en représentation face aux tribunaux

Le président du MoDem, François Bayrou, à son arrivée au procès de l’affaire des assistants parlementaires, à Paris, le 7 novembre 2023.

« Maintenant, profitez du spectacle ! » L’injonction est, en principe, innocente. Elle l’est moins lorsqu’on est prévenu, interrogé à la barre d’un tribunal correctionnel, et que l’on demande à une procureure de la République de cesser ses questions et de se rasseoir. C’est pourtant ce qu’a lancé François Bayrou, mardi 7 novembre, aux procureures de la 11chambre correctionnelle de Paris qui l’interrogeaient dans le cadre du procès des assistants parlementaires du MoDem.

Faire face à un tribunal est, pour l’essentiel des justiciables, un moment difficile, éprouvant, qui peut faire perdre ses moyens, oublier ses mots et ses arguments, d’autant plus s’ils sont pauvres et que l’on en a peu. Il arrive – c’est souvent un moment fort d’un procès pénal – que la maïeutique d’un président d’audience en fasse basculer le cours, lorsqu’un prévenu, poussé dans ses retranchements, admet une contradiction, reconnaît un fait. Mais il est aussi une catégorie particulière de prévenus, qui de la salle d’audience retiennent avant tout le second terme, « audience », et excellent à transformer une audition en tribune, voire en spectacle, dans lequel ils peuvent déployer tout leur art du discours. C’est le cas de nombreux élus de la République lorsqu’ils défilent à la barre.

Son interrogatoire, François Bayrou l’attendait depuis des jours, piaffant d’impatience sur le strapontin réservé aux prévenus. Et il a su le faire durer, de longues explications en coups de sang, de démonstrations menées graphiques à l’appui et pointeur laser en main en petites piques destinées à faire sourire l’assistance, au point qu’une journée n’y a pas suffi. Comme les avocats, les femmes et hommes politiques (nombreux à être issus de leurs rangs) sont des professionnels de la parole, experts à emporter, par leurs mots, la conviction et les suffrages.

Séduction et agressivité

Lorsqu’ils sont en outre, comme François Bayrou ou Nicolas Sarkozy, dont le procès en appel dans l’affaire dite « Bygmalion » démarrait lui aussi cette semaine, rompus aux campagnes présidentielles, ils possèdent un sens aigu de l’animation de salle, de l’interaction avec un public, même hostile. Il faut avoir vu, en décembre 2022, Nicolas Sarkozy passer en virtuose d’un trait d’esprit à un coup de colère, d’une proclamation solennelle à une anecdote humoristique lors du procès en appel de l’affaire dite « Bismuth », l’avoir entendu arracher des rires à la salle en mimant le geste de fermer une porte d’avion, main sur l’oreille pour figurer le fait qu’il est alors au téléphone, pour mesurer le fossé qui le sépare de l’ordinaire des prévenus.

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