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Immigration : le Sénat renforce les leviers d’expulsion des étrangers

Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, au Sénat, le 6 novembre 2023.

Le Sénat a renforcé, jeudi 9 novembre, les possibilités d’expulsion des étrangers « délinquants » ou ne respectant pas les « principes de la République », dans le cadre de l’examen du projet de loi sur l’immigration. Présenté comme la jambe droite du texte, ardemment défendu par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, un arsenal de mesures a été adopté. Il a même été musclé par des amendements de la majorité sénatoriale (composée de la droite et du centre) et du gouvernement, un mois presque jour pour jour après l’attentat d’Arras, le 13 octobre, au cours duquel un professeur de français a été tué par un jeune Russe radicalisé. Ce dernier était en situation irrégulière mais bénéficiait d’une protection contre l’éloignement car il était arrivé avant ses 13 ans en France. « Ce que je demande dans cette loi, c’est qu’on arrête le laxisme, a justifié M. Darmanin, jeudi soir, sur France 2. J’ai besoin d’instruments nouveaux. »

« Vous allez être étonnés par l’ampleur de ce qui peut être fait et de ce que vous avez prévu (…) Le tour des possibles est réellement considérable », s’est réjoui en séance le corapporteur du texte et sénateur centriste du Tarn Philippe Bonnecarrère.

Le projet de loi entend lever les protections contre l’expulsion dont jouissent les parents d’enfants français, les conjoints de Français et les étrangers en France depuis dix ans. Ils ne sont expulsables qu’en cas d’atteinte à la sûreté de l’Etat, s’ils ont été condamnés à cinq ans de prison ou s’ils sont polygames. Le Sénat veut les rendre expulsables dès lors qu’ils ont été condamnés pour des faits punis de trois ans ou plus de prison ou s’ils ont commis des violences intrafamiliales.

Les étrangers arrivés en France avant l’âge de 13 ans, ceux résidant dans le pays depuis plus de vingt ans ou ceux arrivés depuis plus de dix ans et qui sont parents de Français ou conjoints de Français bénéficient d’une protection quasi absolue. Sauf en cas de comportements portant « atteinte aux intérêts fondamentaux de l’Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence ». Le Sénat a voté, jeudi, la possibilité de les expulser en cas de « violation délibérée et d’une particulière gravité des principes de la République » ou en cas de « condamnation définitive pour des crimes ou délits punis de cinq ans ou plus d’emprisonnement ou de trois ans en réitération ».

« Double peine »

« Cinq ans, c’est un vol avec une circonstance aggravante, et trois ans, c’est un vol simple », a illustré M. Bonnecarrère pour démontrer à quel point « on descend bas le niveau des protections ». « C’est le retour de la double peine pour les étrangers », a regretté le sénateur Europe Ecologie-Les Verts des Bouches-du-Rhône Guy Benarroche. Retenir le critère de la peine de prison encourue et non pas prononcée est en outre « disproportionné » par rapport à l’impératif de préservation de la vie privée et familiale. En 2021, 451 étrangers ont été condamnés pour un crime, mais si le nouveau régime est définitivement adopté, des arrêtés d’expulsion pourront s’appliquer à « près de 99 % des étrangers condamnés [et] qui le sont pour des délits », redoute M. Benarroche. « Nous sommes le seul pays dans toute l’UE [Union européenne] à avoir mis ces protections », a défendu M. Darmanin, qui estime pouvoir éloigner 4 000 étrangers de plus par an.

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