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Marche contre l'antisémitisme : l'impossible union de la classe politique française

Depuis son annonce, la « grande marche civique » contre l’antisémitisme, prévue dimanche à Paris, suscite de vives tensions au sein de la classe politique française. L’initiative se heurte au boycott de La France insoumise et à la participation du Rassemblement national jugée encombrante à gauche et dans la majorité et empêchant l’unité nationale souhaitée.

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La marche se voulait consensuelle : une « mobilisation générale » contre la recrudescence des actes antisémites en France – plus de 1 000 en un mois, un record. Mais le défilé annoncé entre l’Assemblée nationale et le Sénat, voulu par leurs présidents Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, a été aussitôt rejeté par Jean-Luc Mélenchon, le leader de La France insoumise.

Pas question pour Marine Le Pen de renoncer. « J’y participerai » et « j’appelle l’ensemble de nos adhérents et de nos électeurs à venir se joindre à cette marche », a-t-elle lancé mercredi.

« Plus il y aura de monde et mieux ce sera », a ajouté la cheffe de file des députés RN, assurant être prête à défiler « en queue de cortège » puisque sa présence dérange. Une polémique similaire avait eu lieu en 2015 pour la manifestation en soutien à Charlie Hebdo, visé le 7 janvier par un attentat islamiste. Le FN avait alors appelé ses partisans à manifester en province.

Marine Le Pen, cheffe de file des députés Rassemblement national, à l'Assemblée, le 23 octobre 2023 à Paris.
Marine Le Pen, cheffe de file des députés Rassemblement national, à l’Assemblée, le 23 octobre 2023 à Paris. © Bertrand Guay, AFP

« À mon sens, le Rassemblement national n’a pas sa place dans cette manifestation », mais « c’est une manifestation publique à laquelle chacun est libre, en conscience, de participer », y compris « chacun des membres du gouvernement », a relevé le porte-parole de celui-ci, Olivier Véran, après le Conseil des ministres.

L’Élysée n’a pas indiqué si Emmanuel Macron serait présent. La Première ministre Élisabeth Borne, dont le père de confession juive a été déporté, y participera ainsi que plusieurs membres du gouvernement.

Malaise

À gauche, le malaise domine. Le numéro un du Parti communiste français (PCF) Fabien Roussel a affirmé qu’il « ne défilera(it) pas aux côtés » du Rassemblement national (RN), héritier du Front national fondé par Jean-Marie Le Pen « plusieurs fois condamné pour propos antisémites » et par « des hommes qui ont collaboré » avec l’Allemagne nazie. 

Le patron des communistes a précisé qu’il marcherait « peut-être à un autre endroit, mais pas avec eux ».

Le numéro un du Parti communiste, Fabien Roussel, à l'Assemblée nationale, le 23 octobre 2023 à Paris.
Le numéro un du Parti communiste, Fabien Roussel, à l’Assemblée nationale, le 23 octobre 2023 à Paris. © Bertrand Guay, AFP

Même embarras chez les socialistes pour qui « la présence du RN à cette marche est illégitime » au vu notamment des propos tenus dimanche par son président Jordan Bardella, pour qui Jean-Marie Le Pen n’était pas antisémite.

Le Parti socialiste (PS) appelle néanmoins « tous les Français, quelle que soit leur position sur la guerre au Proche-Orient, à se joindre à la manifestation ».

Mais les patrons des sénateurs socialistes Patrick Kanner et écologistes Guillaume Gontard ont réclamé que Gérard Larcher « clarifie » le fait que « l’extrême droite n’a pas sa place dans cette marche ».

Les Écologistes y participeront également, mais ont exhorté Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher à exclure les partis d’extrême droite, qui « font de cette marche une étape supplémentaire de leur stratégie de dédiabolisation ». 

Le président des sénateurs socialistes, Patrick Kanner, le 7 novembre 2023 à Paris.
Le président des sénateurs socialistes, Patrick Kanner, le 7 novembre 2023 à Paris. © Ludovic Marin, AFP

Le secrétaire général de Renaissance, Stéphane Séjourné, a également émis les plus grandes réserves quant à la présence du RN. « J’appelle solennellement les organisateurs ainsi que les partis politiques qui y participeront à ne pas être les complices de la banalisation d’un parti fondé par des antisémites », a-t-il dit.

D’autres ont moins d’état d’âme : à droite, Éric Ciotti (Les Républicains), à l’extrême droite Éric Zemmour et Marion Maréchal (Reconquête !) ont immédiatement fait savoir qu’ils en seraient.

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Boycott de Jean-Luc Mélenchon

Seule La France insoumise n’ira pas. « On ne lutte pas contre l’antisémitisme et le racisme dans la confusion », a estimé la formation dans un communiqué diffusé mercredi. « L’ambiguïté des objectifs de cette démarche permet les soutiens les plus insupportables », dit le parti qui refuse de défiler aux côtés du RN.

Déjà la veille, Jean-Luc Mélenchon avait provoqué une nouvelle polémique en déclarant que « les amis du soutien inconditionnel au massacre ont leur rendez-vous » dimanche, « sous prétexte d’antisémitisme ».

Le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, le 25 août 2023 à Châteauneuf-sur-Isère, dans la Drôme.
Le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, le 25 août 2023 à Châteauneuf-sur-Isère, dans la Drôme. © Jeff Pachoud, AFP

Les massacres du 7 octobre, qui ont fait plus de 1 400 morts côté israélien, ont déclenché une guerre dévastatrice entre le Hamas et Israël qui, depuis, pilonne la bande de Gaza. Selon le mouvement islamiste, les opérations militaires israéliennes y ont fait plus de 10 300 morts.

Depuis un mois, La France insoumise est critiquée de toutes parts, y compris par certaines voix dissidentes en son sein, pour le refus de ses dirigeants de qualifier l’organisation palestinienne islamiste Hamas de « terroriste ». Dans son communiqué, le parti répète vouloir « réunir autour des objectifs de paix pour exiger clairement un cessez-le-feu et la libération des otages ».

Avec AFP

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